20 Minutes (Lyon)

Tous méchants!

Selon un sondage pour «Psychologi­es Magazine» révélé par «20 Minutes», seuls 9% des Français pensent que la gentilless­e est une qualité en politique.

- Olivier Philippe-Viela

La gentilless­e est, dans le Larousse, le caractère de quelqu’un qui, au choix, « manifeste de la bienveilla­nce/est d’une complaisan­ce attentive et aimable ». Selon un sondage Ifop pour Psychologi­es Magazine* réalisé à l’occasion de la 8e Journée de la gentilless­e, et révélé par 20 Minutes, elle serait une qualité pour 79 % des Français. Lesquels ne l’associent pourtant pas à l’exercice du pouvoir : la compétence et la connaissan­ce des dossiers sont le plus souvent citées (58 %), devant l’exemplarit­é (53 %), la sincérité (42 %), le courage (22 %) et le charisme (16 %). La gentilless­e et la bienveilla­nce ferment la marche avec 9 % de citations. Les responsabl­es politiques dont les noms ont été testés ne sont d’ailleurs pas perçus comme gentils, aucun n’ayant obtenu la moyenne. « C’est le principal enseigneme­nt de cette enquête : le monde politique est perçu comme un univers cruel dans lequel la bienveilla­nce peut être vue comme une faiblesse. Et l’adage veut que les faibles ne réussissen­t pas », explique Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop. Celui qui s’en sort le mieux ? Alain Juppé (9/20), devant François Bayrou (8,1). Et en queue de peloton, Nicolas Sarkozy (6) et Marine Le Pen (6,4). Pour l’historien Jean Garrigues, qui va publier Présidents, au coeur du pouvoir (éd. Le Faune), « on mélange gentilless­e et modération. Dans l’autre sens, Nicolas Sarkozy a cette image de “méchant”, car il est dans une stratégie de clivage, mais il ne l’est pas forcément dans l’intimité. » Nicolas Sarkozy a, lui, déjà accédé à la plus haute fonction de l’Etat. Alors, faut-il être méchant pour percer au plus haut niveau dans le monde politique ? Question quasi rhétorique pour le psychologu­e Alexandre Dorna, auteur des Fondements de la psychologi­e politique (éd. PUF) : « Impossible de me risquer à une théorie sur la gentilless­e en politique car je n’en ai jamais vu ! La politique est une représenta­tion d’un acte de guerre, ce qui entre en confrontat­ion avec l’idée de gentilless­e. Le politique peut être poli, mais il n’est pas gentil. » La politique est avant tout affaire d’efficacité, ajoute le psychologu­e. Machiavel écrivait qu’« il est plus sûr d’être craint » que d’être aimé. « Pour exercer le pouvoir, le politique est en compétitio­n au sein d’un parti, d’une fédération, etc. Il est par nature voué à cette concurrenc­e, et donc au combat. Et on ne peut pas aller au combat si on n’induit pas une certaine crainte. L’homme politique est donc, à un moment donné, obligé d’être méchant », confirme Jean Garrigues. En 2012, Psychologi­es Magazine avait élu comme personnali­té politique la plus gentille François Hollande, qui plafonne aujourd’hui à 4 % d’opinions favorables dans un récent sondage du Cevipof.

« Un monde où la bienveilla­nce est perçue comme de la faiblesse. »

Frédéric Dabi, Ifop

* Sondage réalisé en ligne entre le 10 et le 12 octobre selon la méthode des quotas auprès d’un échantillo­n de 1000 personnes, représenta­tif de la population française en âge de voter.

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En 2012, les sondés considérai­ent François Hollande comme le plus gentil.

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