20 Minutes (Lyon)

Un employé de l’abattoir de Limoges raconte

L’ouvrier a filmé la mort de vaches gestantes à l’abattoir de Limoges

- Propos recueillis par Elsa Provenzano

Des vaches gestantes abattues, le foetus arraché de leur ventre. Relayées jeudi par Le Monde, ces images chocs ont été filmées dans l’abattoir de Limoges par l’un de ses ouvriers, Mauricio Garcia-Pereira, aidé en cela par l’associatio­n de protection animale L214. Une pratique légale mais que dénonce, à visage découvert, le lanceur d’alerte de 47 ans.

Comment en êtes-vous arrivé à travailler dans cet abattoir?

Quand j’étais serveur, je ne voyais pas mes enfants grandir. J’ai galéré pour trouver un autre boulot, jusqu’à ce que mon agence d’intérim m’oriente vers l’abattoir. Je n’avais pas d’autre choix.

Vous saviez que des vaches portant des veaux y étaient abattues avant d’y travailler?

La première fois que j’ai vu ça, j’ai cru que c’était une erreur. Mon supérieur m’a répondu que c’était normal. Le veau a été placé dans un bac et le placenta dans un autre. Moi, j’étais choqué.

On imagine que c’était très éprouvant pour vous…

Evidemment, c’est très dur. Des fois, je leur parlais aux foetus, je leur disais que j’allais les venger et que tout le monde allait savoir ce qu’on leur faisait. J’ai grandi dans une ferme en Espagne où on élevait des vaches et des cochons. Pour moi, la vie est sacrée. Et ces petits foetus, on les met à la poubelle seulement pour l’argent : ce n’est pas comme s’il y avait un problème sanitaire qui oblige à le faire !

Quel a été le déclic qui vous a incité à dénoncer cette pratique ?

Je n’en avais pas les moyens… L’associatio­n L214 que j’ai contactée m’a soutenu et m’a fourni une caméra. J’ai commencé à montrer des vidéos à mon fils de 15 ans qui m’a dit : “C’est horrible, papa, il faut que tu fasses quelque chose.” Aujourd’hui, je suis soulagé et je sais que beaucoup de mes collègues vont me soutenir. Voir ça tous les jours, à un moment donné, on ne peut plus.

Etes-vous végétarien?

Non, je suis carnivore, mais là on parle de foetus qu’on jette avec la merde à la poubelle, parfois quelques heures avant qu’ils naissent.

Allez-vous perdre votre travail?

J’ai beaucoup de respect pour mes collègues qui font un travail pénible. Aucun jour n’est facile là-bas. Là, je suis en arrêt. Moralement, je suis démoli.

C’est le début d’une action militante ?

Oui, c’était la première grosse bataille ,mais la guerre n’est pas finie. On va demander avec l’associatio­n L214 l’interdicti­on de l’abattage des vaches gestantes au niveau européen. Je vais continuer jusqu’au bout, je suis déterminé.

 ??  ??
 ??  ?? Sébastien Arsac, de l’associatio­n L214, et Mauricio Garcia-Pereira.
Sébastien Arsac, de l’associatio­n L214, et Mauricio Garcia-Pereira.

Newspapers in French

Newspapers from France