Chiqué choc
Considéré comme surjoué voire ringard, le catch aurait des vertus insoupçonnées. Les passionnés témoignent.
Les fans de catch se préparent pour Wrestlemania XXXIII, le 2 avril 2017 à Orlando, en Floride. Scénarisés, surjoués, manichéens, mais tellement humains, les combats portent en eux la contradiction essentielle du vrai contre le faux. Le Dr Guillaume Latarjet, psychologue spécialisé dans le traitement des traumatismes psychiques, a expérimenté des visionnages de combats de catch avec ses patients : « Cela permet de détendre le patient avec une séance plus légère, moins centrée sur sa prise de parole. Ensuite, les combats de catch sont très satisfaisants pour notre cerveau. » Les neurologues ont détecté depuis longtemps le plaisir que l’on ressentait à entretenir un mensonge sans conséquence. Des fonctions du cerveau entrent en concurrence : pour prendre du plaisir, certaines souhaitent y croire, d’autres savent qu’il ne s’agit pas d’un vrai combat. « Les résultats étaient plus probants avec du catch qu’avec du théâtre, note le Dr Latarjet. Peut-être l’aspect brutal, mais chorégraphié joue-t-il, ou le manichéisme des oppositions. » Le catch, c’est un gentil contre un méchant. Quelle que soit l’issue, le spectateur est content. « Je sais que c’est un peu bébête et ringard, mais ça m’amuse tellement, assume Kevin Georgerin, président d’une association de fans de catch marseillais. Avec Internet, tout
le monde sait que les matchs sont scénarisés. Si les catcheurs sont bien des athlètes, c’est pour leur capacité à faire le show sans se faire trop mal. Le catch n’est plus un sport violent, c’est devenu un vrai divertissement grand public. » Mais ils ne sont pas réputés pour être de grands acteurs. « Je trouve que ça donne du charme aux combats, explique Darren Fog, rédacteur en chef du site VoxCatch. Depuis que le catch est clairement proposé comme une fiction, le public est plus varié. La World Wrestling Entertainment (WWE, productrice de la quasi-totalité des spectacles de catch) cherche à élargir son public avec des stratégies dignes des séries télé. Chaque combat serait un épisode que l’on peut suivre et comprendre seul, mais qui donne envie de connaître toute l’histoire des personnages. » Le genre de formule qui a fait le succès de séries comme « Dr House » ou « Les Experts ». Roger Seguin, fan depuis les années 1990, s’adonne à sa passion grâce au pay-per-view développé par la WWE. « Je regarde ça en direct une fois par semaine, au milieu de la nuit du lundi au mardi, explique Roger. C’est sûr que le lendemain, je n’ai pas trop les yeux en face des trous au boulot, mais je ne peux pas m’en passer. J’ai besoin de ma dose. »