Un népotisme fréquent, et légal
Le candidat LR François Fillon n’est pas le seul à avoir fait travailler sa famille
Fillon dans la tourmente. Le candidat Les Républicains à l’élection présidentielle est accusé, dans l’édition de mercredi du Canard enchaîné, d’avoir offert à son épouse, Penelope, un emploi fictif en tant que collaboratrice à l’Assemblée nationale. D’abord dans la Sarthe entre 1998 et 2002, quand François Fillon en était député, puis au côté de son suppléant Marc Joulaud, de juillet 2002 à août 2007, et, enfin, pendant six mois, quand l’ex-Premier ministre a été élu à Paris. Le tout pour une rémunération totale d’environ 500 000 € brut.
« Eviter cette situation »
Alors que ce soupçon d’emploi fictif doit être tranché par la justice (le parquet national financier a ouvert, mercredi, une enquête préliminaire), le cas de Penelope Fillon interroge sur l’habitude qu’ont prise beaucoup de parlementaires d’embaucher un membre de leur famille. Transparency International, association de lutte contre la corruption, est vigilante sur la question. Elsa Foucraut, responsable plaidoyer de l’ONG et ancienne assistante parlementaire PS, détaille l’unique méthode de contrôle disponible : « Au moins 14 % des députés, un sur six, emploient un membre de leur famille. Ce chiffre est probablement en dessous de la réalité, car les seules informations dont nous disposons pour faire le rapprochement sont les noms de famille. Mais, si le nom de famille n’est pas le même, on peut ne rien voir. Il n’y a rien d’illégal en l’état actuel du droit, mais on recommande d’éviter cette situation, parce qu’un soupçon d’emploi fictif est constitutif d’un délit. » Depuis l’affaire Cahuzac et la mise en place de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, les parlementaires sont obligés de signaler l’embauche d’un collaborateur. En 2017, « 131 députés rémunèrent un membre de leur famille », selon Elsa Foucraut. La pratique se vérifie aussi au Sénat. « 35 % », c’est le chiffre qui revient le plus souvent dans les discussions à la Chambre haute, explique la collaboratrice d’un sénateur LR. « Je pense que les proportions sont les mêmes à gauche comme à droite, mais la jeune génération, bien qu’elle ne soit pas majoritaire au Parlement, tombe moins dans ces travers-là », précise-t-elle. Président de l’association de lutte contre la corruption Anticor, Jean-Christophe Picard cite l’exemple des députés européens et des maires français, qui ont interdiction d’embaucher un proche. « Si l’on considère qu’un maire ne peut pas recruter ses enfants, pourquoi un député pourrait-il le faire avec sa femme ? Mais il faut encore démontrer la réalité de l’emploi fictif, ce qui n’est pas évident. Le cadre juridique, aujourd’hui, est insuffisant. »