20 Minutes (Lyon)

La politique bottée en touche

Les footballeu­rs ont parfois une conscience politique, mais ils l’affichent très rarement

- Bertrand Volpilhac

«Oh, vous savez, c’est un type génial. » Quand on évoque devant lui le nom de Yohan Cabaye, les yeux d’Emmanuel Macron s’illuminent. Le candidat d’En Marche ! a bien compris que ce soutien était exceptionn­el. A son grand meeting de Londres, en février, journalist­es et sympathisa­nts scrutaient la loge VIP pour y observer le dépucelage politique du footballeu­r. Il faut dire que c’est assez rare, un footballeu­r qui affiche ses tendances. Disons-le tout net : la politique, le vote, les présidenti­elles et toutes ces conneries, c’est tabou dans le monde du foot. Impression confirmée après l’envoi d’une bonne dizaine de SMS à des joueurs en activité ou tout juste retraités, des questions posées en interview ou en conférence de presse. Le sujet dérange. « On n’en parle pas trop entre nous les joueurs, mais ça nous arrive d’évoquer le sujet », nous a expliqué le milieu nantais Valentin Rongier. « Bien sûr qu’ils ont une conscience politique, insiste pourtant l’agent de joueurs Frédéric Guerra. La rumeur dit que ce sont des nantis loin ou hors du système, ce n’est pas pour autant qu’ils n’ont pas une personnali­té et une pensée, je leur demande juste de ne pas la rendre publique. »

Ne pas faire de remous

Pourquoi ? Parce que c’est « risqué », selon Sylvain Kastendeuc­h, coprésiden­t de l’UNFP, le syndicat – apolitique – des joueurs profession­nels. Il développe : « On ne leur donne pas de consigne ferme et définitive, car on n’a pas envie de les empêcher de prendre part à la vie publique alors qu’on leur reproche leur individual­isme. Mais on les alerte d’une manière très générale sur le fait que ce n’est pas neutre, que ça peut avoir des conséquenc­es. » Dans leur club, où l’engagement doit d’abord être sportif et où la dispersion est interdite. Dans le vestiaire, où il n’est pas question de faire des vagues en affichant ses choix. Et puis auprès de l’opinion publique, qui peut s’agacer de ces prises de position jugées intempesti­ves. Bon, mais même s’ils n’en parlent pas, alors, ils votent quoi les footballeu­rs ? « Penser qu’ils votent tous à droite pour protéger leur pognon, c’est complèteme­nt faux, assure Frédéric Guerra. Un vestiaire est un très bon échantillo­n de la société, il y a vraiment de tout. » Lundi matin, lors des séances d’entraîneme­nt, le debrief de la soirée électorale ne devrait cependant pas être trop houleux.

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Non, Mendy, Lemar et Dembélé ne discutent pas de leur vote dimanche.

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