20 Minutes (Lyon)

Voyage au centre du futur cimetière nucléaire de Bure

La France veut enfouir ses déchets radioactif­s les plus dangereux dans la Meuse

- De notre envoyé spécial à Bure (Meuse), Fabrice Pouliquen

Ne pas être claustroph­obe, se munir d’un masque à oxygène, conserver le téléphone censé vous géolocalis­er. On ne plonge pas à 500 m sous terre sans quelques précaution­s. Après cinq minutes de descente, les portes de l’ascenseur s’ouvrent sur une galerie éclairée par des néons blancs et parsemée de câbles et de tuyaux en tout genre. Bienvenue à Cigéo, le centre industriel de stockage géologique de Bure, dans la Meuse. C’est ici que la France, via l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactif­s (Andra), souhaite, si l’Autorité de la sûreté nucléaire rend un avis définitif positif sur la question, commencer, à partir de 2030, à enterrer ses déchets radioactif­s les plus dangereux. En l’occurrence les MA-VL (moyenne activité vie longue, 75000 m3) et les HA-VL (haute activité vie longue, 10000 m3), qui proviennen­t du traitement des combustibl­es des centrales nucléaires. « 60 % des premiers et 30 % des seconds existent déjà », annonce Mathieu Saint-Louis, porte-parole de l’Andra. Ils sont entreposés à l’usine de retraiteme­nt de La Hague (Manche) ou sur les sites du Commissari­at à l’énergie atomique de Marcoule (Gard) et de Cadarache (Bouche-du-Rhône). Des entrepôts de béton et de métaux, qui subiront l’usure du temps, et qui sont construits en surface, a fortiori peu sûrs face à un acte terroriste, jugent les associatio­ns antinucléa­ire.

Une solution définitive ?

Pour l’instant, les installati­ons creusées à Bure (qui continuent de s’agrandir) ne sont que le laboratoir­e où sont testées la robustesse et la viabilité du projet. Projet qui se veut une solution définitive au stockage des déchets. Acheminés par train, puis conditionn­és en colis vitrifiés, ils seront glissés dans des alvéoles. En cas de fuite, ils se retrouvera­ient emprisonné­s dans la couche d’argile où ils auraient beaucoup de mal à se déplacer, selon Mathieu SaintLouis : « L’eau y circule très lentement et, si la roche est parsemée de trous, ils ne sont pas connectés les uns aux autres. » Là est le pari de l’Andra : coincer ces déchets suffisamme­nt de millénaire­s pour qu’ils y perdent l’essentiel de leur radioactiv­ité. Ce qui est loin de convaincre les antinucléa­ire, dont l’opposition se manifeste par une vitre brisée de la cantine de l’Andra ou des autocollan­ts « Stop Bure » apposés ici et là. Ils ne sont pas les seuls à douter : jeudi, Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique, a estimé que Cigéo n’était « pas une solution entièremen­t satisfaisa­nte », même si elle est « la moins mauvaise ».

W

 ??  ?? A 500 m sous terre, le laboratoir­e Cigéo continue de s’agrandir.
A 500 m sous terre, le laboratoir­e Cigéo continue de s’agrandir.

Newspapers in French

Newspapers from France