Gourmandises
Le cocon de Lyon a comme un goût de renouveau
« Nous sommes tout le temps en rupture et nous devons nous réapprovisionner tous les 15 jours. » Dans la petite confiserie Violette et Berlingot de Lyon, où l’on vend des sucreries d’antan, le succès des cocons en serait presque surprenant. Il s’en écoule 400 tubes par an. Soit environ 8 kg. Un chiffre qui pourrait paraître dérisoire. Mais le cocon revient de loin. « Un outsider », glisse malicieusement Anne-Claire Rigaud, la fondatrice des lieux. « Quand vous en mangez, vous mangez l’histoire de Lyon. Il fait partie du patrimoine ».
Une recette améliorée
Le cocon, c’est une pâte d’amande fourrée au praliné, parfumée à l’orangeat et au curaçao, inventée en 1952 par Jean Auberger, meilleur ouvrier de France. A l’époque, Edouard Herriot, le maire de Lyon, avait lancé un concours pour inventer une spécialité sucrée qui ferait rayonner la ville au-delà des frontières régionales. La recette du chocolatier a fait mouche. Et le cocon est ainsi devenu la première spécialité rendant hommage aux canuts, les ouvriers de la soie. Le produit, qui a connu le succès, est doucement tombé en désuétude à partir du milieu des années 1970. Au point de disparaître totalement des rayons, il y a trois ans. « Son goût un peu désuet a peut-être lassé les consommateurs. Les chocolats à l’alcool ne sont plus vraiment dans l’air du temps», avance Anne-Claire Rigaud. «Le produit n’était plus à la hauteur et les volumes ont considérablement baissé au fil des années », complète Gautier Richart, PDG de la maison du même nom. En 2015, lorsque la production cesse définitivement, l’homme décide d’aller voir le fabricant pour reprendre le flambeau. Pas question que le cocon meure. « On a respecté la recette traditionnelle qu’on a améliorée. On ne voulait pas inventer quelque chose de nouveau », explique-t-il, précisant que sa maison est désormais la seule au monde à concevoir des cocons. «On a rajouté du praliné et travailler le côté moelleux du produit pour qu’il fonde en bouche. On a également peaufiné le candi, c’est-à-dire, l’enrobage du bonbon d’une fine couche protectrice de sucre. C’est toute une science », plaisante le PDG. Depuis l’automne 2016, les cocons sont repartis à la conquête des confiseries. La maison Richart en écoule désormais trois tonnes par an. «On est encore loin de ce qui a pu se vendre, mais le cocon reprend du poil de la bête », sourit l’homme d’affaires, conscient qu’il a fallu batailler pour convaincre certains confiseurs qui ne voulaient plus en entendre parler. « Mais c’est un peu comme la Madeleine de Proust, vous n’oubliez pas… »