Ils ont lancé l’alerte et récolté la tempête
« Gilets jaunes » Les députés de la majorité ont le sentiment de ne pas avoir été écoutés par l’exécutif
Des applaudissements mous et des députés qui se lèvent uniquement lorsque Edouard Philippe rend hommage aux forces de l’ordre : la majorité présidentielle s’est montrée bien moins enthousiaste que de coutume, mercredi, à l’Assemblée. Le Premier ministre s’exprimait devant les députés «sur la fiscalité écologique et ses conséquences sur le pouvoir d’achat », en pleine crise des «gilets jaunes».
« Du gâchis »
La veille, il avait pris la parole devant le groupe LREM pour annoncer sa décision de geler la taxe sur les carburants et le tarif de l’énergie. Malgré ce geste, plusieurs députés critiquent l’exécutif, jugeant qu’il n’écoute pas assez les remontées de terrain des élus. «Lors de ma réunion publique il y a quinze jours, il y a eu de grosses tensions», raconte le député du Rhône Bruno Bonnell.
La contestation des «gilets jaunes» s’amplifie, la lassitude et l’inquiétude aussi au sein des députés de la majorité. « Ça nous tombe sur la tête, alors que cette colère découle aussi des décennies passées. Mais il faut assumer », note le député de l’Hérault Jean-François Eliaou. Pas facile lorsque plusieurs députés LREM disent avoir reçu des menaces de la part de certains «gilets jaunes», que la propriété privée de l’une d’entre elles a été envahie par des manifestants, et qu’ils se font invectiver par des Français en colère sur les plateaux télévisés. C’est aussi l’heure du bilan et des regrets, pour certains élus qui déplorent la suppression de l’ISF au tout début du quinquennat. «Ça a parasité notre discours social », reproche une députée de la majorité. « On est nombreux à avoir un sentiment de gâchis, glisse la députée du MoDem Isabelle Florennes (Hauts-de-Seine).
Et on est inquiets : comment va se passer la manifestation de samedi?» Depuis le début du quinquennat, «il y a eu des mesures annoncées de façon brutale, y compris pour les députés, souligne-t-elle en citant la hausse de la CSG. Nous ne sommes pas le syndicat de défense de l’exécutif. » Mercredi, la porte-parole du parti présidentiel a tenté de remotiver les troupes. « On n’a pas à rougir de notre action, insiste Laetitia Avia. Mais, s’il y a une crise de confiance entre les citoyens et les politiques, c’est qu’on n’a pas fait assez. Il va falloir multiplier les échanges dans les six prochains mois entre les parlementaires, les “gilets jaunes”, les élus locaux… » Une concertation sur laquelle les marcheurs fondent beaucoup d’espoirs pour sortir de la crise.