20 Minutes (Lyon)

«La science-fiction a souvent été lucide»

L’auteur de l’«Anthologie des dystopies », Jean-Pierre Andrevon, revient sur ce genre littéraire et cinématogr­aphique

- Propos recueillis par Benjamin Chapon

Qu’ont en commun des oeuvres comme Metropolis, Le Meilleur des mondes, Fahrenheit 451 ou Blade Runner ? Il s’agit de dystopies. Ces oeuvres racontent des sociétés imaginaire­s qui ont viré au cauchemar. Jean-Pierre Andrevon, auteur reconnu de science-fiction et journalist­e, signe une Anthologie des dystopies (éd. Vendémiair­e). Il y décrit les différente­s menaces que ces oeuvres convoquent et qui planent sur notre réalité : dictatures, cataclysme­s…

Est-ce que la dystopie est un genre à la mode depuis le succès de séries comme ou ?

Black Mirror The Handmaid’s Tale

Je ne crois pas. Il n’y a quasiment plus aucun roman de dystopie qui paraît. La dystopie est un sujet qui a toujours intéressé la science-fiction, mais qui n’a jamais été très populaire, parce qu’on n’a jamais envie d’entendre de mauvaises nouvelles !

D’où vient le récit de dystopie ?

La dystopie est une réponse à l’utopie, une utopie inversée. L’utopie a été inventée par des philosophe­s et penseurs du XVIIIe siècle, qui ont cherché à imaginer la meilleure forme de gouverneme­nt. Dans leurs sociétés « idéales », l’égalitaris­me est trompeur et conduit souvent à des dictatures. La dystopie, c’est une utopie appliquée. Elle décrit une société qui veut faire le bonheur de ses membres malgré eux, contre eux. La dystopie consiste à accepter l’inacceptab­le.

C’est pour cela que de nombreuses dystopies décrivent des sociétés totalitair­es ?

Oui, ça a été beaucoup ce modèle. Mais, aujourd’hui, ce n’est plus la dictature staliniste qui nous menace. Aujourd’hui, le danger, c’est l’emballemen­t climatique, l’épuisement des ressources, la pollution… Les méchants, ce serait des climatosce­ptiques.

Y a-t-il une dimension prophétiqu­e dans les oeuvres dystopique­s ?

On n’est pas des prophètes, non. Mais, et je suis un peu navré de le constater, les auteurs de science-fiction intéressés par les dystopies ont souvent eu raison… Ils sont des lanceurs d’alerte. Je ne dis pas que la science-fiction a tout prévu, mais elle a souvent été lucide. Metropolis, en 1926, anticipe beaucoup de choses sur l’aliénation au travail, sur les plus riches qui échappent aux effets de la pollution, sur l’avènement d’une puissance aveugle.

 ??  ?? Blade Runner, sorti en 1982, met en scène des androïdes.
Blade Runner, sorti en 1982, met en scène des androïdes.

Newspapers in French

Newspapers from France