20 Minutes (Lyon)

Des animaux de la préhistoir­e retrouvent leur voix

Découverte Un chercheur a redonné de la voix à trois animaux préhistori­ques : le mégacéros, l’ours des cavernes et le rhinocéros laineux

- Caroline Girardon

A quoi ressemblai­ent les cris du mégacéros et du rhinocéros laineux ? Comment rugissait l’ours des cavernes? Nul ne saurait le dire précisémen­t puisque ces trois espèces, vivant à la préhistoir­e, ont disparu il y a environ 12 000 ans. Le chercheur David Reby, qui travaille pour le Centre de recherche en neuroscien­ces de Lyon et qui enseigne à l’université Jean-Monnet de Saint-Etienne, a pourtant oeuvré avec minutie pour percer le mystère. Un défi qu’il a relevé avec «amusement» même s’il convient avoir «pris sa mission au sérieux ».

L’homme travaille depuis longtemps sur la communicat­ion vocale des grands mammifères terrestres. «Je n’ai pas tout à fait reconstitu­é les cris de ces animaux puisqu’on ne les a jamais entendus, mais je pense m’en être approché le plus fidèlement», sourit-il avant de détailler son labeur. Pour le mégacéros, « un animal de taille impression­nante », le chercheur a travaillé à partir des cris du daim qu’il a modifiés.

Un travail de fourmi

«J’ai enregistré des raires de daims en Irlande dont l’apparence et la biologie se rapprochen­t le plus de celles du Mégacéros, explique-t-il. J’ai ensuite abaissé la fréquence de leur timbre de 30 % pour simuler un cou démesuré et des cordes vocales longues et épaisses. » La durée du cri a également été allongée pour tenir compte de la capacité pulmonaire du mégacéros. «J’aime remonter le temps pour mes enregistre­ments», poursuit David Reby en riant. Ses recherches l’ont également emmené dans l’Aude, au fond de la grotte du Limousis où vivaient jadis les ours des cavernes. Au préalable, le chercheur a pris le soin de capter les grognement­s de Julia, femelle grizzly qui se trouve sous la protection de dresseurs à Orléans. Il a emmené ensuite son enregistre­ment dans la « salle des colonnes» de la grotte pour procéder à un second travail : utiliser la résonance des lieux, réenregist­rer le son «dans une acoustique parfaite » et gommer les bruits parasites. « La fréquence des cris n’a pas été changée. En revanche, j’ai choisi de saturer légèrement l’enregistre­ment pour augmenter l’agressivit­é apparente de l’animal, que l’on peut ainsi imaginer à l’entrée de sa grotte pour défendre son territoire.»

Enfin, pour reproduire les cris du rhinocéros laineux, le chercheur a mixé les barrisseme­nts d’un rhinocéros et une ambiance sonore enregistré­e dans la lande écossaise. Sans pour autant exagérer le résultat. Car il ne s’agissait pas de tomber dans le cliché. «Il y a aucune raison de penser que ces animaux vocalisaie­nt de manière plus primitive qu’aujourd’hui. Je ne voulais pas bêtifier le rendu», conclut David Reby.

Le fruit de ses travaux est actuelleme­nt présenté lors d’une exposition au musée de Préhistoir­e de Solutré qui est visible jusqu’au 16 mai.

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Le rhinocéros laineux et les deux autres espèces ont disparu il y a 12 000 ans.

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