20 Minutes (Lyon)

« Le pilote automatiqu­e est mon meilleur ami sur le bateau», confie le skippeur Thomas Ruyant

Voile Chaque vendredi, un témoin commente un phénomène de société

- Propos recueillis par William Pereira

Thomas Ruyant (LinkedOut) revient sur le Vendée Globe, et, cette fois, il entend bien boucler son tour du monde en solitaire. Victime, il y a quatre ans, d’une grosse casse après avoir percuté un objet flottant non identifié (ofni) dans les mers du Sud, le Nordiste est de retour avec un bateau tout neuf et suréquipé. Outre les foils 2.0, ces appendices qui font décoller le bateau, Ruyant a mis le paquet sur la sécurité de sa machine pour minimiser le risque d’un nouvel accident en haute mer. Et, pour lui, le progrès technique n’est pas près de s’arrêter en Imoca.

Il y a quatre ans, l’arrivée des foils a changé la donne dans le milieu de la voile. Depuis, qu’avez-vous identifié comme avancées technologi­ques ?

Il y a quatre ans, il y avait des bateaux à foils, là, c’est des vrais foilers. C’est-à-dire que les foils qu’on a sur nos bateaux n’ont rien à voir, et le cap de vitesse et de performanc­e est beaucoup plus important entre les bateaux de cette génération et la génération d’il y a quatre ans qu’entre la génération de bateaux à dérive et la génération des premiers bateaux à foils. On a dû repenser la structure des bateaux, la renforcer, ajouter beaucoup de capteurs à bord pour la sécurité du gréement, de la fibre optique dans les foils.

Quelle est la différence avec ces nouveaux foils?

Avant, il fallait atteindre des vitesses de 14-15 noeuds [26 km/h] et, là, on a des foils qui, dès les 10-12 noeuds, entre 18 et 22 km/h, vont pousser plus fort parce qu’ils sont plus grands.

On a aussi beaucoup progressé sur les formes de ces appendices. En plus, ils réussissen­t à soulever le bateau à partir d’une certaine vitesse. On n’est pas en vol complèteme­nt stable, les bateaux touchent encore l’eau, parfois. Mais on a des vraies phases de vol dans certaines conditions, on peut faire des différence­s de 5-6 noeuds [environ 10 km/h], par rapport à un bateau qui ne décolle pas.

Il paraît que vous avez une montre au

poignet qui vous permet de barrer...

C’est juste une montre que j’ai sur moi en permanence. D’ailleurs, c’est plus un boîtier qu’une montre. Il me permet d’avoir un oeil sur le pilote automatiqu­e du bord pour contrôler le cap du bateau, le mode de pilotage à utiliser... Sachant que le pilote automatiqu­e, c’est notre meilleur ami sur le bateau. Sans lui, la voile en solitaire n’est pas envisageab­le aujourd’hui. Il faut dormir, manger, faire la navigation, donc même avec un pilote automatiqu­e qui barre 99 % du temps, on ne s’ennuie pas, il n’y a pas beaucoup de temps morts.

Qu’avez-vous apporté sur la sécurité du bateau ?

Il y a un outil qui existe depuis longtemps, et qui est le plus efficace aujourd’hui encore, c’est l’AIS, un système de positionne­ment dont le bateau est équipé. On a vu récemment d’autres systèmes apparaître, comme une caméra thermique en tête de mât qui nous permet de voir un objet, une bouée métallique, un pêcheur, sans AIS. Après, on a un autre système, c’est un « pinger » qu’on a dans le bulbe, à 4,5 m sous l’eau, développé par des pêcheurs australien­s. Il envoie un signal qui pourrait permettre de faire réagir un cétacé à proximité du bateau. Mais ça n’évitera pas tous les chocs et tous les problèmes liés à un impact dans l’eau.

Est-ce qu’il y a eu des innovation­s qui vous ont été proposées, que vous jugiez superflues, et que vous avez mises de côté ?

Les innovation­s, elles viennent de nous, donc je n’ai pas en tête d’innovation loufoque. Au contraire, il y a beaucoup de choses qu’on a laissées de côté faute de temps et parce qu’on a envie, sur un Vendée Globe, d’avoir un bateau fiabilisé. Donc il faut faire gaffe à ne pas se disperser. Pour la suite, on a plein d’idées en tête si ça continue après le Vendée Globe, ce que je me souhaite et ce que je souhaite à l’équipe.

C’est top-secret, ces idées, ou vous pouvez en faire fuiter une?

On en parlera l’année prochaine ou dans deux ans. Ou avant le prochain Vendée Globe.

« Le pilote automatiqu­e, c’est notre meilleur ami. » « On a laissé beaucoup d’innovation­s de côté. »

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 ??  ?? Le skippeur Thomas Ruyant, sur LinkedOut, évoque les nombreux progrès technologi­ques réalisés autour des bateaux ces dernières décennies.
Le skippeur Thomas Ruyant, sur LinkedOut, évoque les nombreux progrès technologi­ques réalisés autour des bateaux ces dernières décennies.
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