Le travail à distance, une tendance de fond ?
Deux ans après le confinement et la mise en place du l’heure est au recul et à l’analyse.
Etélétravail,
n 2022, près d’une entreprise sur deux a passé des accords sur le télétravail*. Si l’idée est ancienne, son histoire est relativement récente. Dès les années 1980, les Français rêvent de travail à distance. Une notion alors associée à un espoir de décentralisation de la France. « A cette époque, la DATAR (Délégation à l’Aménagement du territoire) proposait de mettre en place des espaces publics numériques (EPN) pour offrir une escale de travail à distance aux actifs des zones rurales », raconte le sociologue Bruno Marzloff, Président de la Fabrique des mobilités. Mais, il a fallu attendre que les particuliers s’équipent et soient dotés d’Internet et de réseaux partagés pour que le travail à distance prenne son essor.
« Le travail à distance s’est introduit dans les usages des professions autonomes, dans des entreprises qui organisent depuis longtemps des réseaux de bureaux pour leurs seuls employés, puis s’est élargi à des cadres d’entreprise, jusqu’à l’arrivée autour de 2010 du concept de coworking ».
L’épreuve du feu
Avant la pandémie, le niveau de télétravail en France était de 7% : 4% de télétravailleurs occasionnels et 3% de télétravailleurs réguliers. Avec les confinements successifs, le télétravail a atteint un pic inédit de 41% des salariés, en mai 2020, au plus fort de la crise sanitaire. « Cette tendance est certaine depuis longtemps. Mais elle est devenue évidente après la rafale des confinements. La résistance des organisations a été balayée par l’injonction de l’État. Le bon accueil par les usagers de cette modalité a fini par convaincre », affirme Bruno Marzloff. Depuis mai 2021, le travail à distance s’est stabilisé autour de 26% des salariés.
Pas de retour en arrière possible
Tous les actifs ne sont pas égaux face
au travail à distance. De par la nature de leur travail, le présentiel reste incontournable pour près de 40% des Français. « Si nous sommes encore loin d’une généralisation, le principe est acquis par les divers acteurs du travail », estime Bruno Marzloff. Il existe un certain consensus sur la proportion moyenne de télétravail qui est estimée
entre deux et trois jours (2,7 jours par
semaine). Des entreprises se laissent même tenter par le télétravail à temps complet. A l’instar de Airbnb et de ses 6000 employés, en mai dernier. Ou de Salesforce qui a grossi ses effectifs de 21% en un an, sans voir un seul candidat physiquement. Ce changement organisationnel n’est pas neutre. La
crise sanitaire a été un formidable coup d’accélérateur pour l’avènement
de nouvelles pratiques au travail. « La
recherche d’autres manières de travailler s’étend à des organisations à la carte, voire à des congés prolongés. Nous ne sommes qu’aux prémices de la révolution de l’autonomie au travail dont la distance n’est qu’une modalité », prédit Bruno Marzloff.