Sur les routes de l’infortune
A l’entraînement, les cyclistes pros font souvent face aux incivilités des automobilistes
Qu’il pleuve ou qu’il vente, ils sont toujours sur les routes. Dix mois sur douze, les coureurs professionnels escaladent des cols raides comme des murs, dévalent des pentes comme des skieurs et avalent des milliers de kilomètres. Le décès tragique de Michele Scarponi, renversé par un van à l’entraînement, et l’affaire Yoann Offredo, agressé par un automobiliste dans des circonstances encore floues, viennent mettre en lumière un autre aspect de la vie des cyclistes. Celui du danger auquel ils s’exposent chaque jour sur les routes. « Je suis un coureur plutôt prudent voire trouillard à l’entraînement, confie Adrien Petit (Direct Energie). La dernière fois, j’ai fait un kilomètre sur un grand axe et un automobiliste m’a dépassé de tellement près qu’il y a eu comme un appel d’air. » Ce n’est pas un hasard si les coureurs préfèrent rouler sur des routes moins denses et en petits groupes. « J’essaie de m’entraîner tout seul ou en petit comité, pour minimiser les risques », confirme Jérémy Roy (FDJ). Autre ennemi du cycliste, les ronds-points : « La veille de l’accident de Scarponi, je vois une voiture qui s’insère sans se soucier de l’angle mort. Heureusement que j’ai anticipé et ai eu le temps de freiner, parce que le gars n’a pas tourné la tête », peste Adrien Petit, neuvième du dernier Paris-Roubaix.
Faire de la prévention
A force de sentir des voitures les frôler à vive allure, les cyclistes n’hésitent pas à s’en prendre aux automobilistes. « Lors de mes premières années, j’avais tendance à gueuler. Maintenant, je ferme ma gueule, confie Adrien Petit. Ce n’est pas vraiment de la résiliation, mais j’ai eu des histoires… » Des voix s’élèvent pour que les coureurs aient le droit de rouler avec une bombe lacrymogène afin de se défendre. Une idée qui ne fait pas vraiment l’unanimité. « Si on a une lacrymo et le chauffeur une batte, on aura des bastons à tous les coins de rue. Ce n’est pas ça le souci », explique Jérémy Roy. Le problème, pour le coureur de la FDJ, c’est que la répression ne suffit pas. « Tant qu’il n’y a pas vraiment d’accident, les plaintes n’aboutissent pas. » Et la solution, dans tout ça? « Il faut que le sujet soit mieux abordé à l’apprentissage de la conduite », avance Adrien Petit. Mais ce combat ne doit pas seulement être celui des automobilistes. « Il y a certains comportements à reconsidérer chez les coureurs. On est à l’entraînement, pas en course… », conclut Jérémy Roy.