20 Minutes (Marseille)

Les musées ont le feu sacré

Pour l’exposition « La pierre sacrée des Maori », le Quai Branly a organisé une cérémonie

- Benjamin Chapon

Sacrés, hantés ou maudits, de nombreux objets conservés au musée du Quai Branly – Jacques Chirac ont une dimension spirituell­e forte. Ainsi, pour l’inaugurati­on de sa nouvelle exposition, « La Pierre sacrée des Maori », consacrée aux cultes entourant les objets pounamu, sorte de jade de Nouvelle-Zélande, le musée a organisé une cérémonie de bénédictio­n par les représenta­nts de l’iwi Ngai Tahu, une tribu maori. « Cette cérémonie permettra de rendre l’exposition plus sûre pour les visiteurs, explique Dougal Austin, conservate­ur maori du musée Te Papa Tongarewa, d’où proviennen­t les objets de l’exposition. Ces pièces en pounamu sont chargées d’une énergie spirituell­e. Il faut savoir la diriger. » Un mythe fondateur maori raconte qu’au commenceme­nt de l’univers, le ciel et la terre se touchaient et que les pounamu les ont fait s’éloigner pour créer notre monde. Pourtant, le musée a rarement recours à une cérémonie pour ses collection­s. « Même s’ils ont pu avoir un caractère sacré, les objets du musée ne sont plus traités selon les protocoles spirituels qui leur étaient spécifique­s, explique Emmanuel Kasarhérou, responsabl­e de la coordinati­on scientifiq­ue des collection­s. Dès le moment qu’ils rejoignent le musée, ils sont tous traités avec un égal respect dû aux oeuvres d’art. »

Ni exorcisme, ni rité secret

Le musée du Quai Branly ne procède donc à aucun désenvouta­ge, exorcisme, sacrifice ou autre rite secret. « En présence de membres de la communauté d’origine de ces objets, il n’est pas rare que ceux-ci demandent à procéder à des actes pour rendre hommage à leurs objets, raconte Emmanuel Kasarhérou. Dans la mesure où ces actes ne portent pas atteinte à l’intégrité des objets et des lieux et qu’ils n’entraînent aucune discrimina­tion au détriment de tiers, ils peuvent avoir lieu. » Le musée travaille ainsi en relation étroite avec certaines communauté­s, pour l’acquisitio­n de nouveaux objets notamment, l’organisati­on de colloques ou travaux scientifiq­ues, la tenue de spectacles. « Un objet est toujours un lieu de rencontre de savoirs ou de personnes, explique Nicolas Garnier, responsabl­e des collection­s Océanie du musée du Quai Branly. Notre travail consiste à aider ces rencontres-là. Quand on a perdu l’informatio­n sur lui – son lieu d’origine, sa fonction… –, un objet est mort, perdu. »

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Les pierres pounamu font l’objet d’un culte chez les Maori.

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