La ville n’est pas très friande des kebabs
La mairie ne veut plus de certains types de commerces au centre
«On se croirait au bled », « Les gens peuvent manger pour pas cher ». Autant de réactions variées des habitants du centre-ville lorsque la question de savoir s’il y a trop de kebabs, de bazars et de taxiphones leur est posée. Des commerces dans le viseur de la mairie depuis qu’elle a instauré, lundi dernier en conseil municipal, un droit de préemption sur les baux commerciaux. Un plan « antikebab » en d’autres mots. « On assume ne plus vouloir certains types de commerces comme les snacks et les magasins de téléphonie, pour privilégier les commerces de bouche de qualité ou les artisans », expliquait Yves Moraine à
La Marseillaise. Vitrine pour touristes
Dans le quartier populaire de Noailles, les bazars, kebabs et taxiphones sont légion. Benmerabet, 36 ans, y a toujours vécu et semble nostalgique. « Avant il y avait un tabac, un café, un Corse. Aujourd’hui, on se croirait au bled », explique-t-il. Hamdani Seddick, propriétaire du bar de la marée depuis 20 ans, partage cet avis. « Ça a chassé notre clientèle, maintenant c’est devenu un repaire de voyous. » Selon lui, la mairie a aussi une part de responsabilité. « Ils ont laissé faire n’importe quoi. La Canebière est connue mondialement, et pourtant vous ne trouvez que des kebabs », se désole-t-il, assis à une table de son bar, qui a perdu plus de 30 % de son chiffre d’affaires. Sur la place du marché de Noailles, Rafik, 51 ans, et Mostefa, 43 ans, contemplent la saleté ambiante. Pour eux, ces commerces ont pris une part trop importante. « Ils attirent les problèmes et ne font pas partie de l’identité de la ville. On en veut moins, on veut que la ville soit plus propre et qu’elle ait une meilleure image », expliquent-ils. Mais ils n’oublient pas que s’il y en a autant, c’est aussi pour de bonnes raisons. « Les gens sont pauvres. Ils ont la possibilité de manger pour trois ou quatre euros. » Les problèmes d’emplois sont aussi une raison à la prolifération de ces commerces. « Plutôt que de rester à la maison à ne rien faire, les jeunes ouvrent des snacks et font travailler la famille », avancent les deux hommes. Salim, 33 ans, est commerçant sur le boulevard Dugommier. « Le kebab, c’est le repas du pauvre. S’ils installent des restaurants, les gens ne pourront pas y aller. » C’est bien la crainte de certains riverains, dont Fabien, 24 ans, pour qui cette stratégie a déjà bien démarré. « Les kebabs sont un prétexte. Ils veulent faire comme à la Joliette avec les Terrasses du port, une vitrine de la ville pour les touristes. » Vitrines pour touristes ou évolution pour les habitants, la mairie prévoit d’investir 1,5 million d’euros dans ce plan « anti-kebab ».