20 Minutes (Marseille)

La ville n’est pas très friande des kebabs

La mairie ne veut plus de certains types de commerces au centre

- Adrien Max

«On se croirait au bled », « Les gens peuvent manger pour pas cher ». Autant de réactions variées des habitants du centre-ville lorsque la question de savoir s’il y a trop de kebabs, de bazars et de taxiphones leur est posée. Des commerces dans le viseur de la mairie depuis qu’elle a instauré, lundi dernier en conseil municipal, un droit de préemption sur les baux commerciau­x. Un plan « antikebab » en d’autres mots. « On assume ne plus vouloir certains types de commerces comme les snacks et les magasins de téléphonie, pour privilégie­r les commerces de bouche de qualité ou les artisans », expliquait Yves Moraine à

La Marseillai­se. Vitrine pour touristes

Dans le quartier populaire de Noailles, les bazars, kebabs et taxiphones sont légion. Benmerabet, 36 ans, y a toujours vécu et semble nostalgiqu­e. « Avant il y avait un tabac, un café, un Corse. Aujourd’hui, on se croirait au bled », explique-t-il. Hamdani Seddick, propriétai­re du bar de la marée depuis 20 ans, partage cet avis. « Ça a chassé notre clientèle, maintenant c’est devenu un repaire de voyous. » Selon lui, la mairie a aussi une part de responsabi­lité. « Ils ont laissé faire n’importe quoi. La Canebière est connue mondialeme­nt, et pourtant vous ne trouvez que des kebabs », se désole-t-il, assis à une table de son bar, qui a perdu plus de 30 % de son chiffre d’affaires. Sur la place du marché de Noailles, Rafik, 51 ans, et Mostefa, 43 ans, contemplen­t la saleté ambiante. Pour eux, ces commerces ont pris une part trop importante. « Ils attirent les problèmes et ne font pas partie de l’identité de la ville. On en veut moins, on veut que la ville soit plus propre et qu’elle ait une meilleure image », expliquent-ils. Mais ils n’oublient pas que s’il y en a autant, c’est aussi pour de bonnes raisons. « Les gens sont pauvres. Ils ont la possibilit­é de manger pour trois ou quatre euros. » Les problèmes d’emplois sont aussi une raison à la proliférat­ion de ces commerces. « Plutôt que de rester à la maison à ne rien faire, les jeunes ouvrent des snacks et font travailler la famille », avancent les deux hommes. Salim, 33 ans, est commerçant sur le boulevard Dugommier. « Le kebab, c’est le repas du pauvre. S’ils installent des restaurant­s, les gens ne pourront pas y aller. » C’est bien la crainte de certains riverains, dont Fabien, 24 ans, pour qui cette stratégie a déjà bien démarré. « Les kebabs sont un prétexte. Ils veulent faire comme à la Joliette avec les Terrasses du port, une vitrine de la ville pour les touristes. » Vitrines pour touristes ou évolution pour les habitants, la mairie prévoit d’investir 1,5 million d’euros dans ce plan « anti-kebab ».

 ??  ??
 ??  ?? Le quartier de Noailles concentre des commerces visés par la mairie.
Le quartier de Noailles concentre des commerces visés par la mairie.

Newspapers in French

Newspapers from France