Inquiétude et résignation
Gardanne et ses environs sont recouverts de poussières
En arrivant à Gardanne, les couleurs sautent aux yeux. Plutôt que blancs, les panneaux de direction sont gris et les façades, elles, sont rouges. Les poussières et les boues rouges inquiètent l’association ZEA, qui était reçue vendredi par le ministre de l’Ecologie, Nicolas Hulot. L’usine Altéo, présente ici depuis 1893, fut le premier lieu de production d’alumine en France. Ce composant – essentiel pour la réalisation des écrans de téléphone ou d’ustensiles de cuisine – est tiré de la bauxite, une terre rouge. Problème : des boues rouges toxiques découlent de la production d’alumine et ont recouvert la ville de poussière. Si pendant soixante ans, l’usine a évacué ces boues au large de Cassis suscitant la polémique, elle doit désormais contrôler ces rejets. Alors que l’entreposage à ciel ouvert des boues avait cessé durant des années, il est de nouveau d’actualité à MangeGarri, entre Gardanne et Bouc-Bel-Air. A Gardanne, l’usine fait partie du décor depuis longtemps maintenant. « Bien sûr qu’il y a une pollution visuelle. Mais la ville s’est construite autour de l’usine. En s’installant ici les gens savaient. Je ne vais pas m’en plaindre, elle existait avant ma naissance et de la poussière, il y en a de moins en moins comparé à il y a quarante ans », considère Christophe, un habitant.
L’emploi avant tout
Alexis, Yannis, Kylian sont au lycée et vivent aussi à côté du mastodonte. « Oui, on aimerait qu’elle ferme pour trouver un truc plus écologique et ne pas détruire le paysage. Mais on ne connaît personne qui est tombé malade et ça donne du travail », avancentils. Un argument qui revient souvent. Michelle est confrontée au même problème que beaucoup de ses voisins. « Certains disent que ça donne de l’asthme, c’est vrai que quand je vais chez ma soeur à Digne, je respire beaucoup mieux. J’irais volontiers plus souvent dans ma résidence secondaire en Aveyron, mais j’ai ma vie ici », explique celle qui habite à Gardanne depuis quarante-quatre ans. Beaucoup s’interrogent sur la dangerosité de ces poussières de bauxite. Robert a longtemps chassé du côté de Mange-Garri où sont stockées les boues rouges. « Je n’y vais plus, les lapins ont les pattes toutes rouges », affirme-t-il. Pourtant, lui non plus, ne souhaite pas sa fermeture. « J’ai grandi avec, on allait à la piscine dans l’usine juste à côté des bassins d’alumine, alors imaginez ! Je veux plus de contrôle, moins de rejets mais sûrement pas sa fermeture », explique le maraîcher. Craint-il pour ses légumes qu’il vend sur le marché ? « Oh ! Vous savez, on n’est pas sous les vents dominants donc on ne risque rien. Regardez, on n’a pas deux têtes et quatre jambes. »