« L’objectif était de rendre les détenues ordinaires »
La photographe expose à Vincennes des portraits de femmes incarcérées
Elle est l’icône de la photographie en France depuis les années 1980. Jusqu’au 30 avril*, le Centre des monuments nationaux propose une exposition de Bettina Rheims, « Détenues », à la Sainte-Chapelle de Vincennes (Val-de-Marne). L’artiste met en lumière des femmes incarcérées dans quatre prisons françaises.
Comment vous est venue l’idée de photographier des femmes détenues ?
Depuis plusieurs années, Robert Badinter me disait régulièrement que je devrais m’intéresser aux détenues. En France, les conditions de détention des femmes sont extrêmement difficiles. Personne ne s’intéresse à elles.
Comment avez-vous gagné la confiance de ces femmes ?
Elles se sont inscrites pour venir voir mon travail. Je me suis rendue dans quatre prisons, à Lyon-Corbas, Rennes, Roanne et Poitiers-Vivonne, pour leur expliquer ce que je voulais faire. On n’a pas l’habitude de voir les détenues à visage découvert. Les gens n’ont pas envie de penser qu’une femme peut être une criminelle. Elles sont mises à l’écart dans la société, et l’objectif était de les montrer, de les rendre ordinaires en les photographiant sur un fond blanc. Je leur avais dit : « Je ne peux pas vous ouvrir la porte, mais je peux vous ouvrir une petite fenêtre, comme si vous vous évadiez. » Sur certaines photos, on a l’impression qu’elles regardent par la fenêtre.
Considérez-vous que la place de la femme dans la société d’aujourd’hui a évolué ?
La place de la femme évolue, mais pas assez vite. Ça va prendre encore du temps. Je pense que tout commence au moment de l’éducation, à l’école.
* L’exposition sera transférée du 1er juin au 4 novembre au château de Cadillac (Gironde).