Les agents chargés des demandeurs d’asile en grève
Les agents de l’asile entrent en grève contre un projet de loi
Leurs voix sont rares, leurs combats discrets. Ce mercredi, pourtant, les « petites mains » de l’asile en France se mobilisent contre le projet de loi sur l’immigration porté par le gouvernement. Présenté ce matin en Conseil des ministres par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, le texte propose notamment de réduire considérablement les délais de toutes les procédures pour les demandeurs d’asile. Il acte aussi la généralisation des audiences vidéo des réfugiés en cas de recours lorsque la protection demandée ne leur a pas été accordée dans un premier temps. Des mesures « intenables » et « déshumanisantes » pour les équipes chargées d’étudier des dossiers complexes et parfois douloureux.
Moyens insuffisants
« Chaque demandeur est unique et les décisions que l’on prend sont lourdes de sens. Ça prend forcément du temps », justifie Lorraine Dubois, officier de protection-instructeur à l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra) et cosecrétaire du syndicat Asyl. En effet, complète Sylvie Charvin, responsable de la CGTOfpra, « l’officier fait des recherches sur le fond du dossier : est-ce que le demandeur d’asile est militant politique dans son pays d’origine, victime de persécutions religieuses ou liées à son orientation sexuelle ?, etc. » Il faut aujourd’hui en moyenne trois mois pour que les demandeurs d’asile obtiennent une réponse de l’administration. Le texte prévoit qu’il passe à deux mois. Ce qui n’est « pas tenable avec les moyens actuels », tranche Sylvie Charvin. Un constat partagé par les rapporteurs de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), actuellement en grève, et qui interviennent lorsqu’un demandeur d’asile a reçu une réponse négative de l’Ofpra. « On doit lire le dossier, faire des recherches géopolitiques ou dans la jurisprudence pour alimenter les débats à l’audience », développe Sébastien Brisard, secrétaire général du Syndicat indépendant des personnels du Conseil d’Etat (SIPCE). Comme pour l’Ofpra, le gouvernement souhaite raccourcir le temps accordé aux migrants pour déposer leur recours (quinze jours au lieu d’un mois actuellement). Selon Sébastien Brisard, « l’objectif affiché, c’est pour le bien du demandeur d’asile, pour lui donner la réponse la plus rapide. Mais c’est aussi pour expulser plus vite les déboutés. » Ce mercredi, les agents de la CNDA entament leur huitième jour de grève. Un mouvement auquel se joint l’Ofpra.