La dégradation des terres est alarmante
BIODIVERSITÉ Un rapport mondial inédit alerte sur les conséquences de la dégradation des sols
Après trois ans de travail et l’investissement d’une centaine de chercheurs issus de 45 pays, la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), réunie en session plénière à Medellín (Colombie), a rendu public lundi un rapport inédit et alarmant sur la dégradation des terres au niveau mondial. Par « terres », Florent Kohler, anthropologue franco-brésilien coordinateur du chapitre du rapport, entend « les II sols, mais aussi tout ce qui les recouvre : forêts, pâturages, réseaux hydriques… » Et par « dégradation », Robert Watson, le président de l’IPBES interrogé par l’AFP, entend, lui, « la transformation de toute végétation originelle. Cela peut être la reconversion d’une forêt en terre agricole (…), d’une mangrove en élevage de crevettes. » Ainsi, la dégradation des terres est essentiellement due aux activités de l’homme. Elle a des conséquences, par exemple, sur la sécurité alimentaire et l’approvisionnement en eau, qui affecte d’ores et déjà le bien-être de 3,2 milliards de personnes. « La perte de fertilité des terres, dues au surpâturage, aux intrants chimiques, à l’érosion ou à la sécheresse pourrait provoquer une baisse de 10 % des rendements agricoles d’ici trente ans », avertit Florent Kohler.
Des millions de déplacés
Et la France n’est pas épargnée. « En 2016, le rendement des céréales avait diminué de 10 % par rapport à 2015 sans que cela s’explique uniquement par des événements climatiques, rappelle Hélène Soubelet, directrice de la Fondation pour la recherche et la biodiversité (FRB). La baisse de fertilité des sols entrait aussi en compte. » La dégradation des terres pourrait aussi contraindre au moins 50 millions de personnes à migrer d’ici à 2050, et jusqu’à 700 millions si les humains continuent à détériorer la source de leur subsistance. Au-delà du constat, le rapport de l’IPBES formule une série de recommandations pour une gestion plus durable des terres, susceptible de préserver ces dernières ainsi que leur potentiel productif afin de nourrir une population croissante. D’ailleurs, « les bénéfices de cette restauration excèdent de loin le coût de l’inaction », insistent les scientifiques. « En Europe, souligne Hélène Soubelet, les solutions passent par le développement des pratiques agro-écologiques, utilisant moins de pesticides et n’ayant pas recours au labour profond. Cette technique est destructrice pour les sols. »