Catharsis
Près de trois ans après les attentats, la France a retrouvé une forme de joie collective grâce au foot
Vendredi, 4 h du matin, sur la terrasse d’un appartement parisien. Dernière discussion avant le gin de trop. Elle se demande si elle avait le droit de priver sa petite soeur de 9 ans d’un shoot de bonheur populaire sur les Champs-Elysées après la victoire face à la Belgique. Il répond que chacun vit sa peur à sa façon, et qu’il y avait dans la spontanéité des célébrations post-qualifications en finale quelque chose d’extrêmement doux. Une douceur qui s’est prolongée dimanche soir avec le triomphe des Bleus. Sur les Champs-Elysées justement, Catherine, 40 ans, y était avec sa fille, mardi soir : « On a besoin de moments comme celui-là, de se retrouver après les années qu’on vient de vivre. La dernière fois que j’ai vu le peuple soudé comme ça, c’était lors de la marche du 11 janvier 2015 après l’attentat contre Charlie Hebdo. » Aicha, même âge, en était également mardi soir. « Ça fait un bien fou cette joie qui se propage », confie-t-elle. « Le fait qu’autant de gens descendent dans la rue est révélateur d’un besoin de partager quelque chose collectivement. Un grand événement sportif est un moment rare où la population peut communier autour d’émotions positives et consensuelles », explique Nicolas Hourcade, sociologue. En juillet 2016 aussi, les Français étaient descendus dans la rue pour fêter la qualification des Bleus en finale de l’Euro. Une semaine après, un camion-bélier faisait 86 morts sur la promenade des Anglais à Nice. Aujourd’hui, chacun se soigne à hauteur de ses blessures, notre pays se répare petit à petit. Le foot accélère-t-il le processus ?
« Une petite guérison »
Mardi soir, après le coup de sifflet final du match entre la France et la Belgique, le Carillon s’embrase. Folie furieuse dans ce bar parisien où quinze personnes ont perdu la vie le 13 novembre 2015. « Tout ce qui se passe autour de l’équipe de France m’émeut beaucoup. Ces images de vie… C’est très marquant. C’est le signe qu’il y a une petite guérison, relate Alexis Lebrun, porte-parole de l’association Life for Paris et rescapé du Bataclan. C’est un temps, il ne faut pas lui donner une autre signification. » Un temps, un instant durant lequel notre sélection nationale nous offe une formidable raison d’être heureux.