Transition écologique
Elément déclencheur de la crise des « gilets jaunes », cette taxe serait utile pour sortir des énergies fossiles
Revoilà la taxe carbone. Brune Poirson, la secrétaire d’Etat à la Transition écologique et solidaire, a estimé dimanche que l’élément déclencheur de la crise des «gilets jaunes» «reviendra peutêtre» en fonction du grand débat national. C’est un «outil qui est efficace» et « qui a un vrai impact », a-t-elle jugé. De toute façon, rappelle Meike Fink, du Réseau action climat (RAC), « la taxe carbone n’a pas été supprimée ; elle est restée bloquée à 44 € la tonne de CO2, alors que le gouvernement avait prévu de l’augmenter de 10,40 € chaque année jusqu’à 2022». A cette date, elle devait atteindre 86 €.
Indolore jusqu’en 2017
Mais quel impact a-t-elle réellement sur le porte-monnaie des Français? Difficile à dire, tant elle est peu visible. «Elle a été incorporée dans la TICPE, une taxe sur les produits pétroliers lorsqu’ils sont destinés à être utilisés en tant que carburant ou combustible de chauffage», explique l’économiste Christian de Perthuis, fondateur de la chaire économie du climat à l’université Paris-Dauphine. Cette TICPE pèse environ 60% du prix du litre du gazole et de celui de l’essence à la pompe (soit 60 centimes pour le premier et 68 centimes pour le second). «Mais, sur ces montants, la taxe carbone ne représente que quelques centimes. Douze pour le le gazole et dix pour l’essence», précise Christian de Perthuis. Autrement dit, cette taxe carbone peut passer inaperçue, surtout, si, dans le même temps, le prix du baril de pétrole chute. Et c’est ce qui s’est passé à son entrée en vigueur en 2014. «La taxe a été largement compensée par la chute du cours et les Français l’ont longtemps payée sans s’en rendre compte», raconte Christian de Perthuis. Un contexte qui a fait les affaires des gouvernements précédents. «Ils se sont contentés de récolter ces nouvelles recettes en se gardant d’expliquer le pourquoi de la taxe carbone et ses mécanismes », regrette l’économiste.
Mais, aujourd’hui, le prix du baril de pétrole est reparti à la hausse. En parallèle, à son arrivée au gouvernement, Nicolas Hulot a souhaité accélérer la montée en régime de cette taxe carbone associée à un rattrapage complet de la fiscalité du diesel sur celle de l’essence. Cette fiscalité écologique saute désormais aux yeux des Français. « Elle pèse plus en proportion sur les ménages à faible revenu, relève notamment Meike Fink. Nous estimons qu’une taxe carbone à 56 € la tonne aurait un coût moyen d’environ 270 € par an pour un ménage français. Une somme qui n’a pas le même impact si l’on appartient aux 10% des ménages les plus pauvres.» Malgré tout, aux yeux du RAC, la taxe carbone pousse les particuliers à sortir des énergies fossiles. Une petite partie des quelque 10 milliards de recettes qu’elle a dégagés en 2018 est allée au financement de la transition écologique. «Une autre part doit être redistribuée aux ménages les plus modestes», insiste Meike Fink.