Grâce à une bande dessinée, Cherbourg sort de sa bulle
Véritable phénomène local, la série «New Cherbourg Stories» paraît dans tout le pays
C’est parce qu’ils sont « fous amoureux de la ville » que Romuald Reutimann, qui y est né, et Pierre Gabus, qui y vit, ont décidé de situer l’action de leur nouvelle bande dessinée à Cherbourg. Et c’est parce qu’ils ont gardé un souvenir ému des « petits Mickeys » de leur enfance, « qui faisaient partie du quotidien des gens car diffusés dans les journaux, donc gratuits», souligne Romuald Reutimann, que « New Cherbourg Stories » a d’abord été publié, sous forme de fascicules, dans le quotidien La Presse de la Manche. Résultat : un carton absolu qui a captivé toute une région et qui est désormais disponible dans toute la France. Reutimann et Gabus adoptent la même veine rétrofuturiste que celle de leur première série, « Cité 14 » (fauve de la meilleure série du festival d’Angoulême 2012). Dans un Cherbourg «maquillé en New York des années 1930 », les frères Glacère mènent deux enquêtes sur l’échouement d’une créature sous-marine inconnue sur la plage et le vol d’un dossier top secret dans le bâtiment du contre-espionnage local. Aidés par une jeune fille et son petit frère, les jumeaux croisent, sur terre et au plus profond de la mer, des créatures mystérieuses…
Les habitants coscénaristes
Pour palpitante qu’elle soit, l’intrigue n’a, finalement, qu’une importance toute relative. Ce qui surprend, en revanche, c’est l’engouement suscité par une BD originellement destinée à une diffusion confidentielle.
La mairie a commandé à ses auteurs une vingtaine d’illustrations présentant la ville, en grand format, en vue d’une exposition dans le cadre de la neuvième Biennale du 9e art de Cherbourg. Le projet a alors pris une ampleur inespérée : « De nombreuses personnes viennent nous donner des pistes et des idées, se réjouit Pierre Gabus. On nous invite à visiter des lieux insolites de la ville [pour les intégrer dans la BD]. » D’autres initiatives ont suivi, parmi lesquelles la réalisation d’un buste de « grondin », ces créatures marines présentes dans la série, par un sculpteur local. La municipalité envisagerait même la création d’un mur peint, et une étudiante en communication a carrément commencé à étudier l’impact de la bande dessinée sur la diaspora cherbourgeoise.
« New Cherbourg Stories t. 1 », Le Monstre de Querqueville, de R. Reutimann & P. Gabus. Ed. Casterman, 14,50 €.