La communication des cachalots décryptée
Des chercheurs ont prouvé, pour la première fois, que les cétacés communiquent grâce à des clics
Des clics qui font mouche. Les passionnés des fonds marins savent que les cachalots chassent en équipe, en communiquant grâce à une sorte de morse à trois tons : les clics, les codas et les clangs. Les chercheurs du laboratoire d’informatique et systèmes de l’université de Toulon (Var) en ont désormais la preuve. C’est « une première mondiale », souligne le directeur scientifique de l’équipe, Hervé Glotin. « On devinait que les cachalots chassaient en groupe matriarcal, car on les observait en surface, retrace le chercheur à l’université de Toulon. Mais on n’avait à ce jour, au-delà des 50 premiers mètres de profondeurs, que des observations avec des caméras posées par ventouses sur le dos de l’animal. » Ce processus, utilisé notamment par le Marine Conservation Research, est inefficace selon Hervé Glotin.
La plus belle prise de son équipe, réalisée grâce à des drones acoustiques, est une scène de chasse regroupant une demi-douzaine de cachalots, au large de Monaco. «Soit les juvéniles suivent les mouvements de leur tante ou de leur mère, soit ils bénéficient de leurs observations pour mieux voir, par le son, les échos que leurs proies reflètent », explique Hervé Glotin. Pauline Cottaz, qui prépare un documentaire sur la mission, se souviendra longtemps de « l’effervescence » de cet après-midi de janvier. « Quand on voit remonter les cachalots à la surface, je lâche un “oui, ils sont là”, alors que j’avais l’intention de ne pas parler», sourit la réalisatrice. Elle n’était jamais montée sur un navire avant ces huit mois d’expédition – et de confinement dans 200 m2 avec cinq collègues de travail.
La mission, qui a débuté en septembre, s’est terminée le 10 mai, la veille de l’entrée en vigueur du plan de déconfinement. Les dix-huit derniers jours d’observation ont été particulièrement profitables pour le projet. La réduction du trafic maritime a induit une baisse de 10 décibels dans les sons graves. « Les distances de communication entre les cétacés étaient donc multipliées par trois, voire six », apprécie Hervé Glotin.
S’il s’était prolongé, ce silence aurait pu faciliter la reproduction des 500 à 800 cachalots qui vivent au large des côtes françaises et italiennes. « Le bruit est une des grandes perturbations sur la mégafaune de nos mers », peste le chercheur. Il plaide pour une réduction de 15 à 20 % de la vitesse des navires en mer Méditerranée.
« On devinait que les cachalots chassaient en groupe matriarcal. » Hervé Glotin, chercheur