20 Minutes (Marseille)

Reconfinem­ent

Se parfumer, même si l’on ne sort plus de chez soi depuis des semaines, permet « d’exister » ou de « s’évader »

- Clio Weickert

Comme tous les matins, vous vous levez, vous prenez votre petit-déjeuner, vous filez sous la douche (dans le meilleur des cas), vous vous habillez (c’est mieux), puis vous vous plongez dans un vaporeux nuage de parfum avant de partir au boulot. Jusqu’à ce qu’un doute vous assaille. On est en novembre, le reconfinem­ent bat son plein. Alors, à quoi bon sentir bon ? Tout comme on ne s’habille pas forcément pour les autres, on ne se parfume pas que pour les narines de ses collègues ou de ses proches. « On se parfume aussi pour exister, affirme Brigitte Munier, autrice d’Odeurs et parfums en Occident, Qui fait l’ange fait la bête [ed. du Félin]. Quand le parfum vous va, vous êtes davantage vous-même, ça étend votre identité. » De manière inconscien­te, cet effluve dont on s’asperge au quotidien s’inscrit comme une part de nous-même, une « aura olfactive », comme la qualifie l’experte, dans laquelle on aime se draper.

« Beaucoup se mettent du parfum, car c’est une aura protectric­e. »

Annick Le Guérer,

On vous voit venir : celles et ceux qui ne porteraien­t pas de parfum se priveraien­t donc d’une partie d’eux-mêmes ? Evidemment que non. Pour Annick Le Guérer, anthropolo­gue et historienn­e du parfum et de l’odeur, autrice du Parfum : Des origines à nos jours (éd. Odile Jacob), « on a tous une odeur différente, et la camoufler avec du parfum, c’est se priver aussi de son identité. On s’en prive pour être socialemen­t accepté. » Le confinemen­t peut être l’occasion idéale de renouer avec ses odeurs (dans la mesure du raisonnabl­e), une façon de se retrouver avec soi. Mais, au-delà de cette question d’identité, le parfum renferme un redoutable atout : le réconfort. « Beaucoup se mettent du parfum, car c’est une aura protectric­e, analyse Annick Le Guérer. Dans une épreuve de confinemen­t, lorsqu’on est angoissé, se parfumer conforte, rassure. » Le parfum possède aussi un autre pouvoir, celui de l’escapade. Certaines odeurs peuvent même nous faire voyager dans le monde d’avant, là où tout était encore possible. « L’odorat est le sens qui permet de retourner aux souvenirs les plus anciens, à des moments heureux que nous avons vécus, analyse Maïa Lernout, parfumeuse chez Takasago et créatrice du parfum Mon petit. Une odeur va faire ressurgir plein d’émotions, plein de moments. »

Un pouvoir d’autant plus fort que certaines molécules agiraient comme de véritables stimulus sur le cerveau et provoquera­ient des sentiments de bien-être immédiat, comme la vanille. On pourrait ainsi s’évader au bout du monde grâce à des fragrances de mangue ou de coco. Tout en respectant le « un kilomètre max autour de chez soi ».

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Lorsqu’on est angoissé, « se parfumer peut réconforte­r, rassurer ».

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