20 Minutes (Montpellier)

En Irak, malgré la victoire à Mossoul, les réfugiés craignent un retour difficile

Malgré la libération de Mossoul-Est, beaucoup de déplacés craignent de rentrer chez eux

- De notre envoyé spécial à Debaga (Irak), Fabrice Pouliquen

Makhmur est libre désormais. Amir, 18 ans, n’a aucun doute sur ce point. Sa ville, à une centaine de kilomètres au sud de Mossoul, deuxième ville d’Irak, a été reprise à Daesh fin janvier, en même temps que la partie est de Mossoul. La conclusion d’une offensive commencée le 17 octobre par les forces armées irakiennes. Makhmur est libre donc, mais Amir garde malgré tout un sourire mesuré. Sur les 180000 personnes qui ont fui Mossoul-Est et ses environs, 30 000 auraient déjà regagné leur maison. Amir n’a pas encore eu cette chance. « Mon village est complèteme­nt détruit, confie-t-il. Il n’y a plus rien : ni électricit­é ni eau courante. » Pour l’instant, son horizon ne dépasse guère les limites du camp de Debaga, où il a trouvé refuge avec sa famille. Ce village de la région autonome du Kurdistan irakien s’est transformé petit à petit en refuge pour des milliers d’habitants de la région de Mossoul fuyant Daesh.

« Ici, je vais à l’école »

Des alignement­s de tentes en toile blanche posées sur un sol caillouteu­x au milieu de collines où pas grand-chose ne pousse. Dans le camp, la vie est sommaire, « mais, au moins, ici je vais à l’école », insiste Hamad, 14 ans. Un enthousias­me qui n’étonne guère Sharon Behn Nogueira, responsabl­e communicat­ion de l’Unicef en Irak. « Beaucoup d’enfants arrivent traumatisé­s dans ces camps. Mais, après deux ou trois semaines à fréquenter l’école, on les voit reprendre confiance. Ils ne demandent que ça : avoir un lieu où jouer, où poser des questions, où redevenir des enfants tout simplement. » Beaucoup reviennent de loin. Comme Nour, 17 ans, venue de Mossoul-Est. « Sortir, c’était prendre un grand risque. J’ai vu une femme se faire frapper la main jusqu’au sang, juste parce qu’elle ne portait pas de gants. » La jeune fille se souvient aussi des exécutions publiques et des proches tués ou kidnappés par Daesh. Revenir à Mossoul-Est, c’est donc la crainte de replonger dans la guerre. Certes, « les écoles rouvrent, mais il reste encore beaucoup à faire », reconnaît Sharon Behn Nogueira. Sensibilis­er les habitants au danger des mines, remettre en état les circuits d’eau potable... Et puis, la bataille pour reprendre Mossoul-Ouest, toujours sous l’emprise de Daesh, n’augure rien de bon. Nour veut absolument fuir ce contexte. « Dans ma famille, on est tous d’accord pour ne jamais revenir à Mossoul. » Quant à Amir, lorsqu’on lui demande s’il se voit un jour revenir à Makhmur, il répond par un prudent « Inch Allah ».

 ??  ??
 ??  ?? Une école été installée dans le camp de Debaga, dans le Kurdistan irakien.
Une école été installée dans le camp de Debaga, dans le Kurdistan irakien.

Newspapers in French

Newspapers from France