20 Minutes (Montpellier)

La leçon de vie d’une ministre

Ascension sociale, engagement politique, religion... « 20 Minutes » publie en exclusivit­é des extraits de l’autobiogra­phie de Najat Vallaud-Belkacem.

- Delphine Bancaud

«Je m’étais juré que je ne raconterai­s pas, jamais », écrit Najat Vallaud-Belkacem dans La vie a plus d’imaginatio­n que

toi, son autobiogra­phie, qui paraît ce vendredi chez Grasset, et dont 20 Minutes publie en avant-première quelques extraits. « Mais je ne m’appartiens plus tout à fait », justifie-t-elle, expliquant qu’elle souhaite apporter sa vérité pour ne pas laisser la parole à ceux qui « racontent, imaginent, affabulent ».

V L’ascension sociale. Bonne élève, Najat Vallaud-Belkacem fait trois ans de droit, avant de réussir le concours de Sciences Po : « Jamais je ne me serais imaginée là. Comme dit toujours ma mère, “La vie a plus d’imaginatio­n que toi, ma fille!” » Et selon elle, son parcours doit pousser d’autres jeunes de diverses origines à lutter contre l’autocensur­e : « Ne vous excusez jamais de vouloir aller toujours plus loin et toujours plus haut. L’ambition est la richesse des pauvres. » Mais la ministre de l’Education explique aussi que prendre l’ascenseur social l’a isolée : « Parfois, il m’est arrivé de ne me sentir à ma place nulle part (…) il y a eu des repas de famille où mon opinion a été celle de l’élite, des puissants, où les miens m’ont dit : “On ne te comprend plus. Tu es une Parisienne maintenant”. Et inversemen­t, il m’est arrivé de me sentir en profond décalage auprès de mes camarades de Sciences Po. Parce que je ne sortais pas le soir. Parce que je travaillai­s jusqu’à plus soif, trop convaincue que je devais redoubler d’efforts pour prouver que j’étais bien à ma place », confie-t-elle. V Le déclic de son engagement

politique. En 2002, elle ne vote pas au premier tour de la présidenti­elle, car elle est en vacances. Et Jean-Marie Le Pen est au second tour. Elle s’en veut : « J’en ai pleuré de rage (…) Quelque temps après, je me suis inscrite au PS. »

V Son mari. Elle a rencontré Boris Vallaud à Sciences Po et ne l’évoque quasiment jamais. Mais, dans son ouvrage, elle brosse de lui un portrait dithyrambi­que : « Boris, c’est la France, dans sa splendeur et son humanité; universel, engagé, neutre. Il incarne les gens qui ne cherchent pas ou ne voient pas les différence­s : bien sûr, il s’est intéressé à mon origine. Mais, comment dire, ça ne comptait pas (…) . »

V La religion. Elle raconte l’effroi après l’attentat de Charlie Hebdo : « Comment ne pas défaillir d’une douleur redoublée en entendant ces mots empoisonné­s des assassins de Charlie : “On a vengé Mahomet”? Comment ne pas se sentir ravagée, trahie, honteuse malgré soi, quand on a grandi dans cette foi? » confie-t-elle. « Oui, il y a une nécessité urgente que l’islam et ses responsabl­es combattent en leur sein le cancer obscuranti­ste. Mais cela n’a rien à voir avec l’injonction qui a pu être faite aux musulmans de se désolidari­ser des terroriste­s. Cette injonction est scandaleus­e, elle présuppose une complaisan­ce généralisé­e. Alors que c’est l’inverse : la révulsion des musulmans pour les attentats doit être un levier, non pas de stigmatisa­tion, mais de mobilisati­on de tout le pays soudé autour de ces valeurs que les terroriste­s abhorrent (…) », poursuit-elle. D’autant que la ministre écrit avoir « découvert son nom dans une revue clandestin­e de Daesh. A leurs yeux, je suis une double traîtresse. Féministe, laïque, française, libre… et d’origine marocaine. »

« Parfois, il m’est arrivé de ne me sentir à ma place nulle part. » Najat Vallaud-Belkacem

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La ministre de l’Education nationale, le 16 juin 2015.
 ??  ?? Najat Vallaud-Belkacem a voulu, par cet ouvrage, clouer le bec à « ceux qui racontent, imaginent, affabulent ».
Najat Vallaud-Belkacem a voulu, par cet ouvrage, clouer le bec à « ceux qui racontent, imaginent, affabulent ».

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