20 Minutes (Montpellier)

La science drague les grands fonds

- Alexis Moreau

Un poisson armé de 1800 dents, une crevette capable de neutralise­r ses ennemis grâce une onde sonore… Deux créatures non pas issues du cerveau d’un auteur de science-fiction, mais bien de nos océans. « Aujourd’hui, toute exploratio­n aboutit à la découverte de nouvelles espèces », explique Nadine Le Bris, membre de l’Observatoi­re océanologi­que de Banyuls-sur-Mer rattaché au CNRS. Selon l’Unesco, « 2000 découverte­s [seraient faites] chaque année ». Mais quels mystères habitent encore les fonds marins ? En ce qui concerne « les formes de vie de grande taille, nous en connaisson­s beaucoup, détaille l’océanograp­he Patrick Geistdoerf­er. Même s’il n’est pas exclu que nous en trouvions une de temps à autre ». En réalité, une très large frange de nos énigmatiqu­es voisins ne dépasse pas le millimètre. Il s’agit de la « meiofaune ». « Dans ce domaine, on ne peut que spéculer sur leur nombre, selon Nadine Le Bris. Nous n’en n’avons sûrement décrit qu’1%. » D’après l’Unesco, « les groupes macroinver­tébrés », comme les crustacés et les mollusques, sont, eux aussi, assez peu connus. « Dans cette catégorie, le nombre d’espèces à découvrir est estimé à plusieurs dizaines de milliers. »

Nous ne savons pas tout

Car l’océan est immensémen­t grand. Si 75 % de la surface du globe est recouverte de ces étendues salées, 95 % de cette gigantesqu­e masse se situe en dessous des 200 m de profondeur, là où il est le plus difficile d’aller. « Nous étudions les fonds marins depuis 1870 et l’expédition britanniqu­e Challenger, relate Patrick Geistdoerf­er. Grâce à la multiplica­tion des mesures, nous avons une bonne connaissan­ce de la topographi­e des océans mais il y reste beaucoup à faire. » A cette échelle, localiser un squelette de baleine semble « pire que de trouver une aiguille dans une botte de foin », illustre Nadine Le Bris.

Un monde en danger

Aujourd’hui, l’objectif des océanograp­hes est de comprendre comment fonctionne l’écosystème profond. Sauf que le temps presse : moins visibles que les gobelets et les sacs à la surface de l’eau, les micro-plastiques sont aujourd’hui partout, « jusque dans la fosse des Mariannes (10 994 m de profondeur), avertit Nadine Le Bris. C’est un problème pour les espèces qui filtrent l’eau, d’autant plus que nous ne pouvons pas nettoyer les abysses. C’est donc une pollution à très long terme ». Sale histoire.

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Indispensa­ble à la vie des océans, le zooplancto­n est lui aussi menacé.

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