Ça se corse pour Macron
Les nationalistes veulent qu’il tienne ses promesses de candidat
Deux mois après la victoire des nationalistes aux élections territoriales, Emmanuel Macron se rend en Corse. Le président est attendu au tournant après ses promesses de campagne.
Le 7 avril à Furiani (Haute-Corse), le candidat Macron promettait que, une fois élu, il « bâtirai[t] un diagnostic sur la situation et les besoins de l’île de Beauté » et que, « s’il apparai[ssai]t que le cadre ne permet[tait] pas à la Corse de développer ses potentialités, alors nous pourrions envisager (…) de réviser la Constitution ». Dix mois après, les nationalistes corses, qui ont remporté les élections territoriales en décembre, attendent désormais du concret de la part du chef de l’Etat. Ce dernier, qui se rend ce mardi en Corse notamment pour participer à la commémoration du 20e anniversaire de l’assassinat du préfet Claude Erignac, leur a en effet envoyé des signaux contrastés depuis son élection. « Il y a eu l’attitude de l’exécutif lors de la crise catalane, qui a pleinement soutenu Madrid », commence Jérôme Fourquet, directeur de l’Ifop et auteur de La Nouvelle question corse (éd. de L’Aube). Les nationalistes gardent aussi en travers de la gorge les tractations entre LREM et les deux listes de droite en vue de faire barrage à la coalition Pè a Corsica, « pilotées par l’exécutif », juge Jean-Félix Acquaviva, député nationaliste. La venue du tandem exécutif corse Jean-Guy Talamoni-Gilles Simeoni à Paris en janvier n’a pas non plus permis de réchauffer les discussions entre les deux parties. Samedi, une manifestation organisée à Ajaccio (Corse-du-Sud) et visant à « ouvrir le dialogue » sur les dossiers corses (co-officialité de la langue corse, amnistie des « prisonniers politiques »…) a rassemblé entre 6 000 personnes, selon la préfecture, et 25 000 personnes, selon les nationalistes. Dans ce contexte tendu, Emmanuel Macron a soigné son premier déplacement sur l’île de Beauté, effectué en compagnie de trois membres du gouvernement (Gérard Collomb, Jacqueline Gourault et Marlène Schiappa, originaire de l’île). L’hommage au préfet assassiné offrira une tribune à « Macron le régalien, qui souhaite incarner l’ordre républicain et l’autorité de l’Etat », juge Jérôme Fourquet. « On souhaite que l’on évite d’instrumentaliser le temps mémoriel », prévient pour sa part JeanFélix Acquaviva. « Pour le moment, Paris veut cantonner le dossier corse à une dimension technique et administrative et poser comme préalable le bon fonctionnement de la collectivité territoriale unique, estime Jérôme Fourquet. Mais ça ne suffira pas aux nationalistes corses, qui ont joué la carte démocratique. Leur frange la plus radicale s’impatiente. » Un entretien entre Macron et l’exécutif corse a finalement été calé in extremis, moins d’un jour avant l’arrivée du chef de l’Etat. Il aura lieu ce mardi soir.
« La frange la plus radicale des nationalistes s’impatiente. » Jérôme Fourquet, Ifop