Tenue abjecte exigée
Si votre journal a remis son prix 20 Minutes d’audace à The Captain – L’Usurpateur lors du Festival de cinéma européen des Arcs, en décembre, c’est parce que ce film fort et dérangeant, en salles ce mercredi, ne manque pas d’audace. Robert Schwentke raconte l’histoire vraie de Willi Herold (Max Hubacher), un déserteur allemand qui, à la fin de la guerre en 1945, s’approprie le costume d’un officier nazi afin de sauver sa peau.
Audacieux dans le discours. « En montrant la guerre du point de vue d’un faux officier allemand qui se prend pour un vrai, je place volontairement le public dans une situation inconfortable », s’amuse Robert Schwentke. Le réalisateur allemand s’éloigne radicalement des deux derniers volets de la trilogie « Divergente » qu’il a réalisés aux EtatsUnis. Son héros trouve des soldats plus que volontaires pour se salir les mains à sa place, massacrant des innocents avec un enthousiasme gaillard. « C’est parce qu’il y avait des gens prêts à accomplir ces actes que le système a si bien fonctionné », martèle le cinéaste. Schwentke n’y va pas de main morte pour appuyer sa démonstration. Audacieux dans les images. Le directeur d’un camp de prisonniers et son épouse font partie des personnages les plus répugnants du film. L’apparente normalité de leurs rapports de couple, comme leur complicité pour tuer, met extrêmement mal à l’aise pendant une scène d’exécution de prisonniers contraints de courir après avoir été attachés ensemble. « Cette séquence très violente et toutes celles qui s’en rapprochent sont la raison pour laquelle j’ai tourné en noir et blanc, insiste Robert Schwentke. Elles n’auraient pas été supportables autrement. » De la même façon, le cinéaste parsème son film de touches d’humour ironique et burlesque fort bienvenues.
Audacieux dans le message. Il serait bien dommage de révéler les derniers plans de cette oeuvre. Il suffit de dire qu’ils prolongent le malaise du passé au présent. « Le nazisme n’a pas disparu, tant s’en faut : il faut donc se montrer vigilant pour qu’il ne revienne pas en force », explique Robert Schwentke. Ce film dérangeant ne fait aucun cadeau à son public pour asséner cet avertissement.