Le vol de ruches, un nouveau trafic en plein essor
Un phénomène récent, massif, et compliqué à endiguer s’abat sur la profession dans le Centre-Est : le vol de colonies d’abeilles
Impensable il y a une dizaine d’années, le vol de ruches est devenu un véritable business, comme le dénoncent les apiculteurs de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Et le phénomène prend de l’ampleur. « En 2015, on dénombrait 7 infractions du genre en France ; l’an passé, il y en a eu 35», constate le président du syndicat départemental d’apiculture de la Loire, Mathieu Charasse. Plus récemment, 65 ruches ont été dérobées à Serpaize (Isère), début avril, 74 dans la Loire cinq jours plus tard. De quoi démoraliser davantage une profession déjà malmenée par «les changements climatiques, l’implication des produits phytosanitaires, l’arrivée des frelons asiatiques. Comment voulez-vous que l’on tienne?» s’inquiète l’apiculteur. Emu, il cite un collègue de 65 ans délesté des 150 ruches (l’équivalent de 30 000 €) qu’il possédait : «Cela faisait plus de quarante ans qu’il élevait des abeilles, il est venu me pleurer dans les bras. Ses ruches représentaient une partie de sa vie et, en une nuit, tout disparaît. » Au courant de ces pratiques, le syndicat départemental de la Haute-Savoie évoque des bandes organisées, bien renseignées sur ce nouveau marché. « Une colonie d’abeilles coûte aujourd’hui entre 150 et 200 €, contre 80 € auparavant, estime son président, Pierre-Tomas Bouil. Beaucoup de gens malhonnêtes y voient une façon d’arrondir largement leurs fins de mois. » Or, selon lui, « à moins d’être pris sur le vif, il est très difficile de les appréhender, et les gendarmes ne se chargent pas de l’affaire ». Pour Mathieu Charasse, «il pourrait s’agir d’individus étrangers, membres d’un réseau qui chargent durant la nuit un camion, et partent immédiatement vers les pays d’Europe de l’Est pour revendre les essaims.» En attendant, les apiculteurs poursuivent tant bien que mal leurs activités. Certains songent sérieusement à investir dans des puces électroniques ou dans des caméras de surveillance. Même si cette solution s’annonce coûteuse. Mathieu Charasse, quant à lui, a adressé un courrier au procureur de la République dans l’espoir d’obtenir de l’aide. La solidarité, elle, s’organise : un homme généreux a replacé de nouvelles ruches dans la Loire pour redonner le sourire aux plus démunis.
« Une colonie coûte entre 150 et 200 €, certains y voient une façon d’arrondir leurs fins de mois. » Pierre-Tomas Bouil, syndicat de Haute-Savoie