20 Minutes (Montpellier)

Ils sont libérés, délivrés, après une raquette cassée

Le tennisman met parfois son matériel à rude épreuve. Un geste qui divise le public et les observateu­rs

- William Pereira

Short baggy, tee-shirt large et joues rouges… Marat Safin est à Paris pour disputer le Trophée des Légendes. « C’est la première fois que je joue ce tournoi», précise-t-il en espagnol. Car le Russe maîtrise aussi bien la langue de Cervantes que le cassage de raquettes. Ce dont, promis juré, il s’abstiendra pour son bizutage avec les anciens. «Non, je ne peux pas me permettre ça ici », se marre-t-il. De toute façon, Fabio Fognini ou encore Novak Djokovic s’y sont mis avant lui, cette année, à Roland-Garros. «J’ai cassé 1055 raquettes dans ma carrière », confiait la légende Safin à la presse, il y a quelques années. Enervant pour les uns, drôle pour les autres, le casseur de raquettes ne fait pas l’unanimité. « Il y en aura toujours quelques-uns pour siffler, assure le Français Arnaud Clément. Et puis ça dépend aussi de l’attitude du joueur quand il l’éclate. Il y a un petit côté spectacle. » Au-delà des avertissem­ents et des amendes, les équipement­iers se frottent les mains face à un tel comporteme­nt. Le matériel est autant pulvérisé que la marque exposée dans les vidéos partagées. «Ça aide à lâcher cette pression qui s’accumule pendant le match », confie à demi-mot Djoko. « Je préfère un mec qui éclate une bonne fois sa raquette, qui expulse sa tension, qu’un autre qui va avoir une attitude détestable tout le long du match », prévient Arnaud Clément. «C’est un soulagemen­t dans l’immédiat, reconnaît Jean-Paul Labedade, psychologu­e du sport. Par ce geste, on a l’impression d’abolir le temps et la frustratio­n. Ce qui est faux. Quand on ressent le besoin d’extérioris­er d’un coup, ça veut dire qu’on est sous pression depuis longtemps. » Sans parler du fait que l’on fait part de sa vulnérabil­ité à son adversaire. Le mieux est donc encore d’apprendre à se canaliser. «Intérioris­er des émotions peut être bénéfique, poursuit Jean-Paul Labedade. Il y a un sentiment gratifiant de pouvoir se dire : ‘‘J’ai surmonté cette épreuve’’. » La méthode fonctionne bien pour Rafael Nadal, à qui son oncle Toni a interdit de passer ses nerfs sur le matériel dès le plus jeune âge. Mais on s’ennuie assurément moins avec un Fognini sur le court.

« C’est un soulagemen­t dans l’immédiat. » Jean-Paul Labedade, psychologu­e du sport

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L’Italien Fabio Fognini n’est pas toujours tendre avec son outil de travail.

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