Manger du bio « réduit le risque de lymphome »
Cancer La chercheuse Emmanuelle KesseGuyot est coauteure d’une étude sur les effets bénéfiques d’une alimentation bio sur la santé
Selon une étude menée par une équipe de l’Inra, Inserm, université Paris-XIII, Cnam et publiée dans la revue scientifique JAMA Internal
Medicine, l’alimentation bio réduirait significativement les risques de cancer. Emmanuelle Kesse-Guyot, chercheuse à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) et coauteure de l’étude, commente pour
20 Minutes ces résultats.
Les résultats de l’étude démontrent une réduction des risques de certains types de cancers. Pouvez-vous nous en dire plus ? Nous avons analysé un échantillon de près de 69 000 participants de la cohorte française NutriNet-Santé, que nous avons suivis pendant sept ans et divisés en quatre grands groupes alimentaires en fonction de la proportion de produits bio consommés. Nous avons comptabilisé 1 340 nouveaux cas de cancer au sein de notre échantillon et observé la répartition de ces cas dans les différents groupes. Les plus gros consommateurs d’aliments issus de l’agriculture biologique ont un risque général de développer un cancer qui est réduit de 25 %. Pour le groupe le plus consommateur de bio, les risques de développer un cancer du sein post-ménopause sont réduits de 34 %, et les risques de développer un lymphome (un type de cancer du sang) sont quant à eux réduits de 76 %. Or ce sont des maladies qui touchent plus significativement les agriculteurs exposés aux pesticides. Comment avez-vous limité les biais dans votre étude ?
Les grands consommateurs de bio font généralement plus attention à leur hygiène de vie, pratiquent une activité physique régulière, font attention, au-delà du label bio, à la qualité de leur alimentation. Notre objectif était donc d’effacer l’incidence de ces facteurs, afin d’obtenir des résultats les plus fins et fiables possible, sans quoi nos conclusions n’auraient pas signifié grand-chose. C’est pourquoi nous avons tenu compte de leur consommation de tabac et d’alcool, de leur niveau de pratique d’une activité physique, de leurs antécédents familiaux ou encore de leur catégorie socioprofessionnelle.
Quelle réflexion ces résultats invitent-ils à développer ?
A ce jour, les données épidémiologiques disponibles ne permettent pas de conclure à un effet protecteur de l’alimentation bio sur la santé. On peut espérer obtenir plus de moyens pour la recherche, pour mener plus d’études, sur d’autres populations, pour voir si les résultats obtenus sont similaires. Ainsi, si de futures études confirment nos travaux, qu’il y a un consensus scientifique, alors cela permettra de mettre la pression sur le politique. De nettes améliorations peuvent être faites sur ce terrain.