Des étudiants en première ligne
De jeunes volontaires racontent leur expérience passée aux côtés des soignants pendant la crise sanitaire
Aller au front sans arme, ni formation. Certains étudiants infirmiers ou à la fac de médecine se sont portés volontaires pour épauler leurs futurs collègues dans les couloirs des hôpitaux, dans les chambres des Ehpad, au téléphone pendant l’épidémie de nouveau coronavirus. Un plongeon précoce et singulier formateur, mais aussi délicat, expliquent des lecteurs de 20 Minutes.
Thomas, 21 ans et étudiant en deuxième année de médecine à la faculté de ParisSaclay, a voulu se rendre utile pendant l’épidémie. Sa faculté l’a mobilisé à l’hôpital de Melun (Seine-et-Marne), qui a lancé Terr-e Santé, une cellule de télémédecine consacrée au Covid-19. Il devait rappeler les patients qui sentaient leur état de santé se dégrader. «Après le concours si difficile de première année, me retrouver dans le grand bain a été une expérience très enrichissante : j’y ai vu de nombreux bons côtés (richesse du raisonnement, de l’interrogatoire médical, confiance des patients…), mais aussi certains aspects que j’avais sous-estimés (certaines personnes minorant notre rôle, ce qui pouvait rester un peu en travers de la gorge lorsqu’on est volontaire).»
Une vocation, ou pas
Ilona, 19 ans, poursuit, elle, un cursus pour devenir infirmière. Elle est envoyée dans un Ehpad dès le lendemain de sa proposition d’aide. «On m’a indiqué les chambres des résidentes que je prendrai à charge pour la toilette, seule, l’aide à la prise des repas… Je n’ai pas eu de semaine d’adaptation et j’ai surtout suivi les aides-soignantes, alors que je suis étudiante infirmière. J’étais très autonome.» Ce qui l’a marquée, également, c’est l’urgence : «J’aime prendre le temps de bien connaître les résidents avant de faire leur toilette, mais là, ce n’était pas possible.» Certains ont été choqués de voir l’état de l’hôpital public. Car, en passant de la théorie à la pratique, «j’ai pu aussi me confronter à la réalité du monde hospitalier : peu de moyens pour le personnel qui se sent oublié, des heures de travail à rallonge, souligne Thomas. J’espère que, à l’avenir, la condition des personnels de santé sera améliorée.» De nouvelles manifestations en ce sens doivent d’ailleurs avoir lieu mardi dans toute la France. Stress, décès des patients, pénuries… Découvrir son futur métier dans des conditions aussi exceptionnelles en a refroidi quelquesuns : « J’ai vu l’horreur, la panique pour trouver du matériel, les pleurs, la colère, déplore Suzanne, une autre volontaire. Je n’ai pas vu de gens heureux, fiers de leur métier. Je les gênais, car je ne savais encore rien faire. Je vais changer d’orientation, sauve qui peut.» Pour Thomas, en revanche, cette première expérience lui a donné envie de se « tourner vers une spécialité médicale, et non chirurgicale, car j’ai beaucoup apprécié le contact avec les patients, le côté humain du métier.»