20 Minutes (Montpellier)

Cash-cash avec le vaccin

Pfizer, Moderna, AstraZenec­a, Johnson & Johnson… Même s’ils affichent des stratégies de prix différente­s, les laboratoir­es pensent aux bénéfices.

- Nicolas Raffin

Avec son vaccin contre le Covid-19, Pfizer va bénéficier d’une injection de cash. En février, le groupe américain a annoncé que, pour son seul produit, il prévoyait de réaliser en 2021 un chiffre d’affaires de 12,6 milliards d’euros, et un bénéfice avant impôt d’environ 3,4 milliards d’euros. « Le vaccin anti-Covid va rapporter énormément d’argent aux laboratoir­es pharmaceut­iques », souligne Nathalie Coutinet, économiste de la santé et enseignant­e-chercheuse à l’université Paris-13.

Deux tendances se dégagent. D’un côté, le suédo-britanniqu­e AstraZenec­a et l’américain Johnson & Johnson (qui produit le vaccin Janssen) assurent ne pas faire de profit à court terme avec la pandémie. Les deux groupes ont répété qu’ils produisaie­nt des doses « à prix coûtant ». De l’autre, les américains Pfizer et Moderna assument un profit immédiat. A l’été 2020, le PDG de Pfizer, Albert Bourla, jugeait que l’idée de ne pas faire de bénéfice était « radicale et fanatique ». S’il évoquait un profit « marginal » pour son groupe grâce au vaccin, une note d’un analyste américain estimait, pour sa part, la marge entre 60 et 80%. Ces deux stratégies se reflètent partiellem­ent dans les prix. Dans l’Union européenne, Moderna et Pfizer vendent leurs doses le plus cher.

Des bénéfices attendus

Pour justifier leurs tarifs, ces deux groupes rappellent que leur vaccin à ARN messager est une innovation. Pfizer et Moderna seraient-ils les méchants, face aux « chevaliers blancs » AstraZenec­a et Janssen ? La réalité est plus complexe. « Si les stratégies des labos peuvent être différente­s du point de vue de la technologi­e utilisée ou de la communicat­ion, ils ont en revanche la même stratégie économique », juge Quentin Ravelli, chargé de recherche au CNRS. A savoir : gagner de l’argent. Ainsi, tous les labos n’hésitent pas à faire fluctuer leurs tarifs en fonction des clients et de leurs demandes (nombre de doses, délais…). « AstraZenec­a peut s’ouvrir des marchés avec des remises ou des prix coûtants, poursuit le chercheur. Mais la masse de consommate­urs potentiels est telle que cela va permettre une profitabil­ité très élevée. De plus, il n’y a pas obligation de transparen­ce sur les coûts de production. » En octobre, le Financial Times a publié un document montrant qu’AstraZenec­a prévoyait d’augmenter ses prix dès juillet 2021, considéran­t que la pandémie serait alors « terminée ». Quant à Johnson & Johnson, distribuer un vaccin à prix coûtant est l’occasion d’améliorer une image de marque un peu ternie.

 ??  ??
 ??  ?? Tous les labos font fluctuer leurs tarifs en fonction de la demande.
Tous les labos font fluctuer leurs tarifs en fonction de la demande.

Newspapers in French

Newspapers from France