20 Minutes (Nantes)

Hazanavici­us s’amuse du mythe Godard

Le réalisateu­r s’empare de la vie du cinéaste suisse et le rend (enfin) amusant

- De notre envoyé spécial à Cannes, Stéphane Leblanc

Il ne faut pas s’étonner si Jean-Luc Godard a les oreilles qui sifflent. Après Agnès Varda et JR qui parodie la visite du Louvre de Bande à part dans Visages villages, Michel Hazanavici­us s’attaque au cinéaste suisse mythique, en le dynamitant en compétitio­n au Festival de Cannes. « En tant que spectateur, Godard ne m’intéresse pas plus que ça, balaie Michel Hazanavici­us. Et j’ai pensé que les gens également. » Ce qui a plu au réalisateu­r de The Artist et de « OSS 117 », c’était de « raconter une histoire d’amour qui se délite ». Celle que l’actrice Anne Wiazemsky retrace dans son roman Une année studieuse sur la vie qu’elle partageait en 19671968 avec Jean-Luc Godard, cinéaste certes célèbre, mais surtout très drôle dans ses contradict­ions. C’est l’argument qu’il a avancé à Anne Wiazemsky qui ne croyait pas en la possibilit­é d’adapter son roman au cinéma. « Il suffirait d’en faire quelque chose de marrant », lui a-t-il lancé. Pas un film à la gloire de Godard, donc. Et la voilà qui accepte. Le Redoutable (du nom du sous-marin nucléaire qui faisait la une à l’époque, à l’aube de mai 1968) sera une sorte de Grand Détourneme­nt, film des débuts de Michel Hazanavici­us, focalisé sur l’icône de la Nouvelle Vague, déconstrui­t et remodelé « comme un personnage de BD ».

Une mauvaise foi chronique

Pour le servir, Louis Garrel, acteur doué pour le mimétisme et dont le cinéaste « pressentai­t la dimension comique ». C’est lui qui apporte sa crédibilit­é au personnage et donne son rythme au Redoutable : il est souvent tordant, avec ses répliques à l’emportepiè­ce, sa mauvaise foi chronique, son caractère de chien battu, et quelques running gags savoureux autour de ses lunettes et de ses chaussures… « Attention, ce n’est pas un film de Godard, ni même un film sur Godard, prévient Michel Hazanavici­us. C’est mon Godard à moi. » Un personnage pour qui le public « pourra avoir de l’empathie même s’il ne connaît pas son oeuvre », espère le cinéaste. Et Godard dans tout cela, qu’en penset-il ? « Je l’ai mis au courant, raconte Michel Hazanavici­us. Il a tenu à lire le scénario. Je le lui ai envoyé, mais il ne m’a pas répondu. Je lui ai proposé de lui organiser une projection, mais il ne m’a pas répondu non plus. » Peut-être préférait-il rester seul chez lui en Suisse avec ses oreilles qui sifflent.

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Michel Hazanavici­us (à gauche) avec l’équipe du film sur la Croisette.

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