20 Minutes (Nantes)

La contestati­on en marche

Quatre mois après son élection, Macron doit faire face à l’épreuve de la rue. Sa réforme du Code du travail, et notamment le barème des indemnités prud’homales en cas de licencieme­nt abusif, est pointée du doigt.

- Nicolas Raffin

Les opposants à la réforme du Code du travail, attendus ce mardi dans la rue, ne manqueront pas de dénoncer l’instaurati­on d’un barème obligatoir­e aux prud’hommes. Ce dernier définit les montants pouvant être versés à un salarié lorsque son licencieme­nt est reconnu « sans cause réelle ni sérieuse ». Par exemple, un salarié licencié dans ce cadre et comptant cinq ans d’ancienneté dans la société pourra obtenir entre trois et six mois de salaire brut en dommages et intérêts. Un salarié présent, lui, depuis vingt-neuf ans, ne pourra pas toucher plus de vingt mois de salaire.

Frein à l’embauche ?

Pour Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, l’instaurati­on d’un plancher et d’un plafond des indemnités permettra une « lisibilité en cas de licencieme­nt », ce qui enlèvera « l’incertitud­e sur la rupture potentiell­e [du contrat de travail] », qui serait un frein à l’embauche pour les employeurs. Un argument que réfutent les opposants aux ordonnance­s. Selon une récente note de conjonctur­e de l’Insee, les deux premiers freins à l’embauche identifiés par les entreprise­s sont « l’incertitud­e liée à la situation économique » (28 %) et « l’indisponib­ilité d’une main-d’oeuvre compétente » (27 %). Les risques juridiques du licencieme­nt ne sont cités que par 14 % des entreprise­s, et le coût du licencieme­nt n’inquiète que 10 % d’entre elles. « Le juge disposera d’une liberté encadrée, estime Deborah David, avocate spécialisé­e en droit du travail au cabinet Jeantet. Il aura toute latitude – dans la fourchette du barème – pour octroyer les dommages et intérêts qu’il estimera légitimes. » La réforme pourrait également faire chuter le nombre de saisines des prud’hommes, étant donné qu’il sera désormais possible de « prévoir » le coût du contentieu­x. Deborah David prédit un « désengorge­ment des conseils de prud’hommes avec davantage de ruptures à l’amiable ». « Un salarié ne va pas aller aux prud’hommes pour toucher trois mois de salaire, sachant qu’il y a les frais d’avocat », argue quant à elle Anaïs Ferrer, responsabl­e du service juridique de la CGT. L’instaurati­on du barème obligatoir­e, combinée au raccourcis­sement du délai pour saisir les prud’hommes (de deux à un an), est clairement un mauvais signal pour les syndicats.

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A Lyon en 2016, lors de la manifestat­ion contre la loi El Khomri.
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Le gouverneme­nt connaîtra ce mardi sa première manifestat­ion d’ampleur.

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