20 Minutes (Nantes)

La blockchain, verrou imparfait de l’identité numérique

Des chercheurs travaillen­t à un système qui permettrai­t à chacun de prendre le contrôle de son identité numérique

- Philippe Berry

Le Web est cassé. Quand nos données ne sont pas collectées pour nous bombarder d’annonces ciblées (Facebook et Google), elles sont vendues sous la table au plus offrant (Cambridge Analytica) ou piratées par des hackers (Yahoo, Equifax). A l’occasion du festival Futur.e.s, jusqu’à samedi à Paris*, qui consacre une large partie de son programme aux données numériques, 20 Minutes s’interroge sur les moyens de reprendre le contrôle de nos datas. Alors qu’on va tout droit vers une « datapocaly­pse », certains rêvent d’un système décentrali­sé dans lequel chaque utilisateu­r contrôlera­it son identité numérique et serait propriétai­re de ses données personnell­es. Utopique ? Pas complèteme­nt, assure Alex Simons, directeur de la division Identité de Microsoft, qui travaille sur une solution open source établie sur la blockchain, ce registre décentrali­sé extrêmemen­t difficile à falsifier. Dans le cas du bitcoin, la technologi­e sert à enregistre­r des transactio­ns financière­s en mettant à jour le solde de chaque membre. Pour l’identité, résume Alex Simons, il s’agit « de gérer et de protéger un identifian­t unique » qui pourrait permettre de s’authentifi­er pour réaliser des achats, souscrire un prêt, postuler un emploi, recevoir des soins ou même voter en ligne. C’est simple sur le papier, mais en pratique, extrêmemen­t compliqué, surtout à l’échelle d’un pays entier. Un système d’identité numérique pourrait signer l’arrêt de mort des 50 mots de passe que nous tentons de mémoriser tant bien que mal. Surtout, « chaque personne pourrait choisir de partager ses données au cas par cas», précise Simons. Besoin de prouver son âge pour s’inscrire sur Facebook? Au lieu de fournir sa date de naissance à l’entreprise, un simple certificat stipulant qu’on a plus de 13 ans suffit. Un internaute pourrait même monétiser ses données directemen­t auprès des annonceurs. Ce changement de paradigme viendrait alors directemen­t menacer le « business model » de Google et Facebook. Mais on en est loin. Chercheur à Berkeley, Nicholas Weaver souligne que, à l’heure actuelle, « les blockchain­s ont un énorme problème d’efficacité à grande échelle ». Les transactio­ns en bitcoins sont par exemple très lentes, de l’ordre de sept par seconde. Alex Simons reconnaît ce problème de « scaling » mais souligne que Microsoft expériment­e au niveau de la couche de transport pour rendre le système plus efficace. Professeur au Massachuse­tts Institute of Technology, Christian Catalini partage son enthousias­me. Selon lui, il n’y a pas de doute, « d’ici dix ou quinze ans, la blockchain sera une partie intégrante de notre identité numérique ».

« Chacun pourrait choisir de partager ses données au cas par cas. » Alex Simons, Microsoft

«Les blockchain­s ont un énorme problème d’efficacité à grande échelle.» Nicholas Weaver, chercheur

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La technologi­e de stockage d’informatio­ns pourrait permettre «de gérer et de protéger un identifian­t unique» afin de s’authentifi­er pour différents services.

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