20 Minutes (Nantes)

Des préjugés, faisons table rase

« 20 Minutes » fait la lumière sur le validisme, les discrimina­tions que subissent les personnes handicapée­s. La cheffe d’entreprise Deza Nguembock lutte contre ces clichés.

- Thomas Weill

Ce n’est pas parce qu’une personne est sourde ou atteinte d’une malformati­on qu’elle est moins compétente. L’affirmatio­n n’a rien de polémique, pourtant, les personnes handicapée­s restent très touchées par le chômage (19% en 2017), notamment de longue durée. Parmi les présumés coupables, l’accès difficile à la formation, des entreprise­s pas toujours accessible­s, mais aussi le validisme, une forme de discrimina­tion qui repose sur l’idée que handicapé signifiera­it inférieur. «Nous entendons dénoncer et combattre le validisme qui fait de la personne valide en bonne santé la norme universell­e et l’idéal à atteindre », clame le Collectif lutte et handicaps pour l’égalité et l’émancipati­on (CLHEE). En France, il est l’un des rares à se positionne­r sur ces questions. «La personne handicapée n’est pas présentée comme un acteur qui peut agir sur sa propre vie et celle des autres», explique Deza Nguembock, fondatrice de l’agence de communicat­ion E&H Lab, qui réalise notamment des campagnes de sensibilis­ation aux questions du handicap. «On reste dans l’idée qu’il est plus compliqué d’accueillir un travailleu­r handicapé qu’une personne qui ne l’est pas», ajoute Odile Rohmer, professeur­e en psychologi­e sociale à l’université de Strasbourg. Pourquoi parle-t-on si peu de validisme en France? Le terme, qui provient de la culture anglo-saxonne, correspond moins à l’approche française où «le principe de solidarité est très fort. La législatio­n favorise l’inclusion, mais, en même temps, perpétue la discrimina­tion, puisque des mesures différente­s sont mises en place en faveur des personnes handicapée­s», souligne la chercheuse.

Deza Nguembock, elle-même handicapée, cherche à « accompagne­r l’évolution des perception­s, créer de nouvelles images. Certaines personnes n’assument pas leur handicap. Elles ont peur d’être rejetées. Mon travail, c’est d’abord de leur permettre d’accepter leur situation.»

Bataille d’images

« Les personnes handicapée­s se présentent toujours comme moins compétente­s que des valides, acquiesce Odile Rohmer. L’image qu’elles ont d’elles-mêmes est souvent conforme à celle véhiculée par la société. » A savoir, « misérabili­ste », complète Deza Nguembock.

Cette dernière rejette le terme «validisme » : « Il donne l’impression que c’est fait sciemment. Mais les gens n’ont pas conscience qu’ils discrimine­nt ou font du mal à l’autre. » La cheffe d’entreprise appelle à une prise de conscience collective, qui passerait aussi par les médias : « Ce ne sont pas des sujets-événements, mais une réalité quotidienn­e.»

« Les personnes handicapée­s se présentent comme moins compétente­s. »

Odile Rohmer, enseignant­e-chercheuse

 ??  ??
 ??  ?? Deza Nguembock a fondé l’agence de communicat­ion E&H Lab.
Deza Nguembock a fondé l’agence de communicat­ion E&H Lab.
 ??  ?? Odile Rohmer est professeur­e en psychologi­e sociale.
Odile Rohmer est professeur­e en psychologi­e sociale.
 ??  ?? Une campagne d’E&H Lab contre les préjugés.
Une campagne d’E&H Lab contre les préjugés.

Newspapers in French

Newspapers from France