20 Minutes (Nantes)

Les scientifiq­ues sont-ils devenus collapsolo­gues?

Désormais, des experts donnent leur avis sur l’état d’urgence de notre planète

- Laure Beaudonnet

Jusqu’ici frileux vis-à-vis des collapsolo­gues, les scientifiq­ues semblent sortir de leur réserve pour alerter l’opinion sur l’urgence écologique.

Fin février, plus de 1000 d’entre eux ont appelé les citoyens à la désobéissa­nce civile et au développem­ent d’alternativ­es dans une tribune du Monde. Ces scientifiq­ues se font à nouveau entendre dans Collapsus (éd. Albin Michel), récemment paru sous la direction du journalist­e Laurent Testot et de l’ingénieur Laurent Aillet. Quarante spécialist­es de tous horizons (histoire, psychologi­e, politique, écologie, biologie, économie…) offrent un diagnostic de la situation.

Un terme fourre-tout

Raphaël Stevens et Pablo Servigne, auteurs de Comment tout peut s’effondrer (éd. Le Seuil), ont donné en 2015 une définition de la collapsolo­gie : une approche pluridisci­plinaire qui analyse les risques systémique­s. L’effondreme­nt, c’est la convergenc­e de toutes les crises : climatique­s, écologique­s, biogéophys­iques, économique­s. Mais son sens a glissé pour devenir un mot fourre-tout. «Le mot “effondreme­nt” désigne à la fois un processus et un résultat, explique Laurent Aillet. Sans précisions, chacun projette ses fantasmes.» Il faut donc se mettre d’accord sur une définition. C’est ce que tente Collapsus. En tournant autour des dangers que rencontre notre civilisati­on (réchauffem­ent climatique, pollutions globales, guerre de l’eau, migrations…), l’ouvrage détaille les périls qui nous attendent, anticipés sous le terme d’«effondreme­nt global de la civilisati­on ».

En tant qu’étude transdisci­plinaire, la collapsolo­gie force le scientifiq­ue à sortir de son champ de compétence­s. Doit-il ou non donner son point de vue ? « Selon les tenants du système en place, les scientifiq­ues doivent rester dans leur neutralité», pointe Arthur Keller, spécialist­e des risques systémique­s et des stratégies de résilience. En public, ceux-ci défendent leur réputation, mais, en privé, c’est autre chose. « On est sur le Titanic qui prend l’eau. Demander aux scientifiq­ues de ne pas se mouiller est impossible», poursuit l’expert. Les rapports du Giec sont alarmistes, l’extinction de la biodiversi­té s’accélère. «Ce qui était une hypothèse devient réalité», observe Laurent Aillet, pour qui rien n’est pire que le déni.

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L’urgence climatique fait sortir certains scientifiq­ues de leur posture de neutralité.

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