20 Minutes (Nantes)

«La violence est consubstan­tielle à la culture de Twitter»

- Propos recueillis par Hélène Sergent

Après une décennie passée à tenter de débattre et de chasser «le faux» sur Twitter, Samuel Laurent (photo) a décroché. Journalist­e au Monde, il publie une analyse désenchant­ée de cette plateforme avec J’ai vu naître le monstre, Twitter va-t-il tuer la #démocratie? (éd. Les Arènes).

Quel rôle Twitter a-t-il joué sur la fabricatio­n de l’informatio­n ?

A l’origine, Twitter était un outil rêvé qui permettait aux journalist­es de trouver des sujets facilement en leur donnant l’illusion de voir tout ce qui se passait dans le monde. Le problème, c’est que, très vite, il y a eu une surreprése­ntation des sujets nés sur Twitter dans la fabricatio­n de l’informatio­n. Si la majorité des rédactions n’a pas vu arriver le mouvement des «gilets Jaunes», c’est parce qu’il n’est pas né sur Twitter mais sur Facebook, un réseau sur lequel les journalist­es sont moins actifs.

Quand vous vous lancez sur Twitter, vous dites : « Je pense qu’on peut, par la seule discussion, convaincre une personne qu’elle se trompe. » Pourquoi cette idée est-elle devenue, comme vous l’écrivez, « stupide » ?

Parce que je l’ai fait des milliers de fois et que je me suis bien rendu compte que ça ne fonctionna­it pas. Convaincre quelqu’un en 140 signes, c’est sans espoir. Twitter, c’est le média de l’indignatio­n et de la colère.

Des personnali­tés ont récemment fait le choix de quitter le réseau…

Twitter a conscience de la violence qui s’exprime sur ce réseau. Mais elle est consubstan­tielle à la culture de Twitter. Avoir une parole modérée est de plus en plus difficile. Pour autant, abandonner Twitter n’est pas forcément la solution, c’est aussi à nous, journalist­es qui l’utilisons, d’adopter une pratique plus apaisée. Bref, de se méfier de l’attrait pour le « buzz ».

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