Marine Le Pen joue à fond la carte de la « normalisation »
La présidente du RN tente d’apparaître plus rassurante auprès de l’électorat, notamment de droite, pour l’emporter en 2022
A un peu plus d’un an de la présidentielle, le Rassemblement national affine sa stratégie. Fin janvier, Marine Le Pen renonçait cette fois à la suspension des accords de Schengen, défendant désormais l’idée de maintenir la liberté de circulation aux seuls ressortissants européens. Le 21 février, la candidate du RN à la présidentielle affirmait que la France devrait bien rembourser les emprunts contractés dans le cadre de la crise liée au Covid-19. « Il y a là un aspect moral essentiel », écrivait-elle dans une tribune publiée dans L’Opinion. La stratégie est claire : tenter de normaliser son programme pour attirer de nouveaux électeurs et l’emporter en 2022.
Après la défaite à la présidentielle 2017 et l’échec aux législatives, le parti s’est remis en question. « On a constaté que certains avaient toujours un doute sur notre capacité à gouverner, convient l’eurodéputé Philippe Olivier, proche conseiller de Marine Le Pen. On a alors revu certaines positions, pour mieux intégrer les logiques internes de l’Etat, comme le Conseil constitutionnel ou le Conseil d’Etat, afin de transformer un parti d’opposition combatif en un parti de gouvernement.»
Dans cette volonté de normalisation, terme que Philippe Olivier réfute, le Front national devient Rassemblement national en 2018, et gomme petit à petit les mesures pouvant effrayer une partie des Français, notamment l’électorat de droite. « Nous écoutons le peuple français, sur l’euro comme sur l’immigration, car il ne faut pas être dogmatique. Il s’agit d’ouverture, pas de concessions», complète Gilles Pennelle, membre du bureau national et tête de liste RN pour les régionales en Bretagne.
Par ses changements de pied, le RN ne risque-t-il pas toutefois de laisser filer une partie de l’électorat contestataire vers Florian Philippot ou Nicolas Dupont-Aignan, l’ancien allié du second tour ? Au RN, on met en avant les bons sondages de la candidate. « Notre électorat traditionnel est extrêmement fidèle et nous tendons maintenant la main à des électeurs qui n’ont peutêtre jamais voté pour nous », répond Gilles Pennelle.
Une stratégie payante ? « La marque Le Pen reste très forte au sein de son électorat traditionnel, indique Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’Ifop. Et l’un des freins au vote RN en 2017 était le saut dans l’inconnu lié à la sortie de l’euro, qui le discréditait auprès des personnes âgées, des cadres supérieurs et professions libérales, craignant pour leurs économies. Mais les bénéfices de cette stratégie sont aujourd’hui encore très maigres. »
«Nous écoutons le peuple français. Il s’agit d’ouverture, pas de concessions. »
Gilles Pennelle, membre du bureau national du RN