Le Curé nantais veut garder la foi
Impactée par la crise sanitaire, la production de cet emblématique fromage cherche un nouveau souffle
Bien que peu connu au niveau national, le Curé nantais est incontournable en Loire-Atlantique, et à Pornic en particulier, où il est fabriqué depuis les années 1980.
Très prisé des restaurateurs et crémeries haut de gamme, ce fromage à pâte molle au lait cru a vu sa production plus que doubler depuis dix ans. Mais cette croissance a été subitement stoppée avec la crise liée à la pandémie de Covid-19. Car après avoir produit près de 250 t en 2019, la fromagerie de Pornic est parvenue à sortir à peine 150 t l’an dernier. «Ça nous a mis une grosse claque. Si on n’était pas soutenus par un groupe, on aurait peut-être mis la clé sous la porte », reconnaît Pierre Gairot, responsable du site, propriété de Triballat Noyal (Sojasun, Vrai, Petit Billy…) depuis 1999.
Le Curé nantais a été fortement pénalisé par la fermeture des restaurants, problématique qui « n’est malheureusement pas résolue ». Il a aussi subi le changement de stratégie de la grande distribution, laquelle s’est recentrée il y a un an sur les produits à dominante industrielle. « La GMS [grande et moyenne surface] représente d’ordinaire 30 % de nos ventes, reprend Pierre Gairot. Quand la crise est arrivée, elle a dénoncé les contrats du jour au lendemain. Ça a été une catastrophe. » La fromagerie s’est retrouvée avec « des milliers de fromages sur les bras », qu’elle n’avait d’autre choix que de brader. Comme si cela ne suffisait pas, l’affinage en cave, déréglé par l’arrêt de production, a ralenti la reprise pendant plusieurs semaines, créant une pénurie. « On travaille sur de la matière vivante, c’est ce qui fait le charme et la complexité de ce métier», insiste Pierre Gairot. S’il aura « secoué » la vingtaine d’employés du site de Pornic, cet épisode a en tout cas «servi de leçon», assure son responsable. «On veut moins dépendre de la GMS et travailler davantage avec les plateformes Internet et fournisseurs régionaux. On espère aussi développer la vente directe. » L’export pourrait aussi être renforcé. « On vend du Curé nantais en Belgique, aux Pays-Bas, en Grande-Bretagne, en Suède et même au Japon. C’est bien pour l’image de marque, mais ce n’est pas très important en volumes », indique Pierre Gairot. Compte tenu du contexte, le projet d’extension de la fromagerie, envisagé pour permettre une hausse d’activité, est, lui, suspendu.
« On veut moins dépendre de la grande et moyenne surface. »
Pierre Gairot, responsable
du site de Pornic