Monter au front la fleur sans fusil
Mel Gibson réalise « Tu ne tueras point », un film à la fois pacifiste et ultra-violent
Avec Tu ne tueras point, Mel Gibson signe un film pacifiste d’une violence inouïe sur l’histoire vraie d’un objecteur de conscience pendant la Seconde Guerre mondiale. Il envoie Andrew Garfield recueillir des blessés en plein coeur de batailles terribles dans le Pacifique sud. Mélange ahurissant de grands sentiments religieux et de brutalité extrême, cette plongée dans la vie de Desmond Doss (1919-2006) secoue sans ménagement. « J’ai été ébloui par le courage de cet homme prêt à se sacrifier pour ne pas utiliser une arme. Il a sauvé de nombreuses vies amies et ennemies en mettant sa religion en pratique », confie Mel Gibson à 20 Minutes. Cette fresque guerrière sur un héros qui refuse de tuer a quelque chose de schizophrène. « J’ai construit mon film en deux parties, précise Gibson. Dans la première, Doss affronte la violence psychologique de l’armée. Dans la seconde, il fait face à une horreur viscérale. » Le quotidien d’un jeune paysan, devant faire la part entre son patriotisme et ses convictions profondes, se métamorphose en cauchemar sanglant au fil du récit.
La foi face à l’horreur
Le réalisateur de La Passion du Christ (2004) et d’Apocalypto (2007) s’y entend pour filmer des séquences aux frontières du soutenable. « La brutalité de la guerre donne sa valeur à l’engagement religieux de mon héros, insiste Gibson qui n’hésite pas à montrer comment les soldats des deux camps se faisaient massacrer. J’ai voulu opposer sa foi à l’atrocité des affrontements. » Le film brosse toutes les facettes d’un personnage complexe. De ses amours avec sa fiancée (Teresa Palmer) à ses rapports difficiles avec son père vétéran (Hugo Weaving) en passant par sa relation avec un officier bourrin (Vince Vaughn) et à sa solidarité pour ses compagnons d’armes, toutes ses facettes sont explorées. « La force de cet homme qui conserve son humanité dans des circonstances inhumaines m’a ébloui », avoue Mel Gibson. Réalisé avec un petit budget et de façon indépendante, Tu ne tueras point confirme le statut de franc-tireur du réalisateur qui trace sa route loin des grands studios. « Je crois que mon film me ressemble dans sa quête de pureté au milieu du chaos », estime le cinéaste. Son introspection qui fait flirter l’intime avec le spectaculaire fascine.