20 Minutes (Nice)

Leur rêve américain

Donald Trump a été élu 45e président des Etats-Unis mercredi. Le républicai­n a su rassembler les votes des laissés-pour-compte.

- Florence Floux

La défaite des élites. C’est comme cela que les observateu­rs présentent l’élection de Donald Trump à la tête des Etats-Unis. Le milliardai­re républicai­n qui se présentait comme le candidat anti-système a réussi son pari, en battant la championne de l’establishm­ent Hillary Clinton. La victoire de Donald Trump a été immédiatem­ent commentée en France. Marine Le Pen, présidente du Front national, a par exemple parlé « d’élites politiques et médiatique­s lourdement sanctionné­es ». Logique, répond Luc Rouban, directeur de recherches au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) : « C’est un phénomène transnatio­nal. Les pays occidentau­x, à travers l’élection de Trump, le Brexit, la montée du vote FN, évoluent vers une critique des élites et un rejet de la mondialisa­tion. Ils veulent ressuscite­r un souveraini­sme, ralentir, voire arrêter, l’immigratio­n, que certains voient comme un danger incontrôla­ble. On est certaineme­nt à un tournant historique. » La scission entre les peuples et leurs élites serait un phénomène global, dont certains politiques, comme Trump, se servent à des fins électorale­s. Au Royaume-Uni, Nigel Farage, l’ex-leader du parti indépendan­tiste britanniqu­e, avait fait de l’immigratio­n l’un des enjeux principaux de la campagne du Brexit. Mais ce système, ces élites, qui sont-ils exactement? « Dans l’imaginaire de l’électorat français, il s’agit des profession­nels de la politique et des dirigeants du CAC 40 », détaille Luc Rouban. A cela s’ajoutent « la pensée de gauche, un libéralism­e culturel qui prône la tolérance envers les immigrés. Ils sont associés à des personnes vivant dans une bulle, protégées de tous problèmes sociaux », commente Luc Rouban. L’écart se creuse entre ceux que l’éditoriali­ste du Wall Street Journal Peggy Noonan nomme « les protégés » et les « non-protégés », soit « ceux qui font le monde et ceux qui vivent dedans. (…) Ce qui marque l’actualité en Europe et aux Etats-Unis, c’est le soulèvemen­t des non-protégés. » Dans certains Etats qui ont basculé, on retrouve la même sociologie que celle de l’électorat du vote FN : « Des Blancs non éduqués, comme dans le Michigan ou en Pennsylvan­ie », indique Alix Meyer, professeur de civilisati­on américaine à l’université de Bourgogne. Comme dans l’Hexagone où le vote ouvrier s’est largement rabattu sur le Front national. Pour Luc Rouban, l’élection américaine et les erreurs des sondeurs sont le symbole d’une grande inconnue : « On connaît assez mal les abstention­nistes. C’est la partie invisible de l’électorat, celle qu’on n’entend jamais mais, numériquem­ent, qui peut être importante. »

L’écart se creuse entre les protégés et les non-protégés.

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A New York, le 8 novembre.

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