Le rugby plaqué pour le foot
Les Bleus de Deschamps (re)font aujourd’hui rêver davantage que ceux de Novès
Puisqu’on peut devenir président de la première puissance mondiale en insultant la moitié de ses habitants, aucune raison de se retenir. Vendredi, c’est France-Suède en foot, samedi, c’est France-Samoa en rugby, et pour le dire franchement, on n’en a pas grand-chose à carrer de FranceSamoa. Il y a encore deux ans, on vous aurait proposé un traitement équivalent. Mais ça, c’était avant que la France ne se désintéresse du rugby.
L’ambiance a migré
Alors, oui, un sondage BVA indiquait en juin que le rugby était le sport collectif préféré des Français (39%), devant le football (29%). La bonne blague. Sans doute les mêmes qui racontent qu’ils vont voter démocrate et qui finissent par choisir Donald Trump dans l’isoloir. Des preuves ? Pas de souci. France-Suède se déroulera à guichets fermés à Saint-Denis, comme le France-Côte d’Ivoire mardi à Lens. Pendant ce temps, les billets pour le France-Australie de la semaine prochaine sont bradés à moitié prix, afin de remplir le troisième anneau du Stade de France.
Quant à l’ambiance sur place, elle a suivi la courbe des résultats. En 2010-2011 (Grand Chelem conclu à la maison, finale mondiale perdue d’un rien), c’est au rugby qu’on entendait le plus de bruit. Aujourd’hui, c’est à se tirer des balles, et c’est au foot qu’on va jusqu’à lancer des chants d’un virage à l’autre, truc de dingue.
Pire, le rugby est aussi en train de perdre sur le terrain culturel, qu’on lui pensait acquis définitivement. Qu’en est-il des fameuses « valeurs » de l’ovalie...? Force est de constater qu’aujourd’hui, l’argent y circule comme au foot, les joueurs ne sont pas plus accessibles, quant au spectacle proposé... « Dans le rugby, on a encore une volonté de cultiver cet entre-soi, explique Joris Vincent, maître de conférences à l’université de Lille-II et historien de ce sport. A part des chefs d’entreprise comme Jacky Lorenzetti (patron du Racing 92), il n’y a pas vraiment d’envie d’ouvrir leur milieu. Le rugby est un micropouvoir dans les localités, dans les régions. » Bref, le rugby donne l’impression de mourir à petit feu.