De nouvelles règles pour le licenciement économique
Les nouveaux motifs du licenciement économique, censés booster les CDI, inquiètent
Ce jeudi entre en vigueur l’un des articles les plus contestés de la loi Travail : celui qui porte sur le licenciement économique. Désormais, les entreprises qui enregistrent une baisse de leurs ventes ou de leurs commandes pendant une période donnée pourront automatiquement licencier des salariés, dont le nombre dépendra de la taille de l’entreprise.
La loi donne donc une définition chiffrée et universelle de ce qu’est une difficulté économique, alors qu’il appartenait jusqu’à présent au juge de l’apprécier. Pour Pascal Lokiec, professeur de droit social à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense, « cette évolution peut conduire à des effets pervers ». Et d’illustrer : « Une entreprise pourra licencier si ses résultats sont bons mais s’ils se révèlent moins exceptionnels que ceux de l’année précédente. » Si l’exécutif a changé les règles, c’est « pour que les entreprises recrutent davantage en CDI plutôt qu’en contrats précaires », expliquait récemment à 20 Minutes la ministre du Travail, Myriam El Khomri. D’après elle, les employeurs embauchent peu en CDI parce que, notamment, ils redoutent que leurs licenciements économiques soient, en cas de recours, assimilés par le juge prud’homal à des ruptures du contrat de travail « sans cause réelle et sérieuse ». Ce qui les obligerait à verser des dommages et intérêts aux salariés abusivement renvoyés.
Des micro-CDD à la pelle
Un argument qui ne convainc pas l’économiste Eloi Laurent, professeur à Sciences-Po et à l’université de Stanford : « La rupture conventionnelle, introduite en août 2008, poursuivait exactement le même objectif [à savoir sécuriser le licenciement pour favoriser les embauches en contrats pérennes], mais nous voyons bien qu’elle n’a pas renforcé les recrutements en CDI. » La France est, dans l’Union européenne, le deuxième pays qui recourt le plus aux CDD et, surtout, aux contrats très courts : 70 % des CDD proposés sont inférieurs à un mois.
Danièle Chanal, du syndicat d’avocats d’entreprises AvoSial, est certaine qu’il y a « des entreprises dont les indicateurs vont matcher avec la nouvelle définition [de la difficulté économique] et qui attendent décembre pour démarrer leurs plans ». Pour l’instant, ce type de licenciement est « minoritaire ». Sur les 55000 licenciements enregistrés chaque mois en 2013*, un tiers seulement est lié au motif économique. Les deux tiers restants relèvent du « motif personnel » (faute du salarié, insuffisance professionnelle) ou de la rupture conventionnelle.