Parler pour évacuer le traumatisme du 14-Juillet
Des victimes se retrouvent et s’expriment dans des groupes de parole
«J’avais l’impression de me noyer. On me sort enfin la tête de l’eau. » Face à d’autres victimes, Frédéric verse une larme, mais surtout il raconte. Il arrive à mettre des mots sur cette soirée du 14 juillet. Sur le drame. Et sur ce qu’il traverse depuis. « Arriver à exprimer tout cela, c’est une grande victoire », explique ce Niçois de 48 ans. Comme six autres « impliqués », il participait la semaine dernière au premier « stage thérapeutique de reconstruction » après l’attentat de Nice. Des groupes de parole et des ateliers organisés dans les salons d’un hôtel par l’Association française des victimes de terrorisme (AFVT) et le département des Alpes-Maritimes.
Cauchemars et terreurs
Ce soir-là, sur la promenade des Anglais, Frédéric était touché à la jambe. Comme son fils, il échappait de peu à la mort. Près de cinq mois plus tard, il se déplace avec des béquilles. Mais c’est surtout dans sa tête que la souffrance est immense. « Je pensais être assez fort pour m’en sortir tout seul, expliquet-il. Mais on se replie sur soi avec ses cauchemars et ses terreurs. » Les images des corps meurtris le hantent. Parler semble être la clé. « Ces drames sont des tsunamis qui bouleversent tout, relève le psychologue Dominique Szepielak, responsable de ces stages. Ces gens traumatisés présentent souvent un trouble de la dissociation qui peut aller jusqu’à les empêcher de faire certaines choses de la vie quotidienne. Le travail en groupe permet de les reconnecter avec ce quotidien. » En fin de semaine, Frédéric a fait un grand pas. Il s’est remis au volant et a pu emprunter la prom’. « J’ai vu un camion blanc et j’ai failli vomir. Mais je me suis concentré sur la route et j’ai réussi. » Pas à pas, il avance.