20 Minutes (Nice)

Cupidon existe, il s’appelle Kévin

A 25 ans, il est « matchmaker » pour une applicatio­n de rencontres

- Annabelle Laurent

Le XVIIe siècle avait ses marieurs et ses entremette­uses. Le XVIIIe avait ses agences matrimonia­les, les toutes premières. Puis, le XXIe a inventé les « matchmaker­s », des arrangeurs de coups nouvelle génération, payés pour analyser des dizaines de milliers de profils d’un site de rencontres et y créer des « matchs » entre célibatair­es. Kévin (un pseudo) est l’un d’eux. Le jour, il travaille sur sa toute jeune marque de prêt-à-porter masculin, le soir, de retour chez lui, il ouvre le logiciel de l’applicatio­n de rencontres française Once, deux heures par jour, weekend compris, pour récolter 250 à 400 € par mois. Contrairem­ent à Tinder, Once ne propose qu’un seul profil par jour. Aux utilisateu­rs – 800 000 en France – d’accepter ou non la propositio­n qui leur est faite par un matchmaker. Ils sont 150 en France, auxquels s’ajoute une centaine d’autres en Europe. « Entre 30 à 40 % sont à pleintemps, et peuvent se faire un peu plus qu’un smic, entre 1 500 et 2 000 € par mois, assure Amélie Guérard, 25 ans, qui les forme et les supervise. Les profils sont très variés, il y a pas mal d’étudiants qui font ça à mi-temps. Notre plus ancienne et meilleure matchmaker, c’est une fermière qui habite au fin fond de la campagne. Son taux de réussite est d’au moins 55/60 %. » Comprenez le taux de réponses positives qu’elle obtient de la part des célibatair­es auxquels elle propose des profils. Kévin est à 42 % de matchs, un bon score… « C’est hyper intriguant ce taff, je ne savais pas trop dans quoi je me lançais. J’ai dû dire si j’étais un habitué des applis, quelle était ma définition d’une rencontre, d’un match, ce qui fait un beau couple… C’est très informel, ils s’en foutent de ce que t’as fait, de ton CV. C’est ta personnali­té. Apparemmen­t, ils ont été convaincus par ma sensibilit­é, par le fait que j’ai toujours aimé provoquer les rencontres, même au collège, quand j’étais un des beaux gosses et du coup, on m’écoutait. »

30 secondes par profil

Sur la plateforme, Kévin a un profil. Le but du jeu est de l’associer à un autre parmi la vingtaine présélecti­onnés par l’algorithme. Il n’a ni prénom, ni âge, ni ville renseignée­s sur les profils, pour respecter la vie privée des utilisateu­rs. Du coup, les photos sont son seul indice pour les faire matcher. Démonstrat­ion. Un profil apparaît. Un emoji en guise de bio, aucune info. Kévin énumère ce qu’il détecte sur les photos : « Plongée, eau, beau teint, vacances… A droite, tu passes les profils des filles en revue… Tiens, elle…

Elle est sur un bateau… Pour moi, ça, c’est un match. » Il clique. Demain, l’homme au beau teint sera le « match du jour » de la fille au bateau, et réciproque­ment. Et c’est tout. Kévin a pris sa décision en 34 secondes. « C’est rapide, mais c’est du feeling, estime Kévin. Le ressenti d’un humain est incomparab­le. La machine, elle, fait ce qu’on lui dit. Nous, on a le coeur, en plus du cerveau... Et c’est hyper gratifiant de contribuer à la rencontre et possibleme­nt à l’amour. Avec les matchmaker­s, on est comme une petite team qui répand l’amour. »

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