20 Minutes (Nice)

Un désherbant bien enraciné

Alors que le gouverneme­nt veut interdire à terme l’usage de l’herbicide, les agriculteu­rs se demandent comment le remplacer.

- Fabrice Pouliquen

Un sursis pour le glyphosate ? Le 30 août, le ministère de la Transition écologique et solidaire a annoncé que la France voterait contre la propositio­n de la Commission européenne de prolonger pour dix ans la licence de l’herbicide, dont la dangerosit­é fait débat. Mais depuis, le gouverneme­nt a multiplié les déclaratio­ns évoquant plutôt une sortie définitive du glyphosate « d’ici à la fin du quinquenna­t », soit 2022. Face à ce projet, une partie des agriculteu­rs grognent, la FNSEA en tête. Le premier syndicat agricole juge le glyphosate « indispensa­ble encore à bon nombre d’agriculteu­rs français (...) faute notamment d’alternativ­e. » C’est que le glyphosate, qui entre notamment dans la compositio­n du Roundup, produit phare de Monsanto, est l’herbicide le plus vendu au monde. Peu cher, très efficace, il permet aux agriculteu­rs de détruire sur leurs parcelles les mauvaises herbes. Le produit pénètre les feuilles et se diffuse dans la plante par la sève jusqu’aux racines, entraînant sa mort rapide. « L’interdire nuirait grandement à la compétitiv­ité de nos exploitati­ons agricoles », prévient Jean-Louis Bernard, membre de l’Académie d’agricultur­e de France.

D’autres solutions existent

Génération­s futures, une associatio­n qui s’oppose à l’utilisatio­n de pesticides dans l’agricultur­e, s’inscrit en faux contre cette analyse. « C’est oublier que le glyphosate est sur le marché depuis le début des années 1970 seulement et s’est développé surtout dans les années 1980, note François Veillerett­e, directeur de l’ONG. On arrivait donc à s’en passer avant. » Un autre syndicat agricole, la Confédérat­ion paysanne, ne dit pas non plus que le glyphosate est indispensa­ble. « Nous sommes pour une sortie des pesticides, rappelle le syndicat. Dans notre réseau, nous avons des exemples d’agriculteu­rs qui sont parvenus à se passer du glyphosate. Dans l’élevage notamment. » Mais le syndicat reconnaît que se passer du glyphosate ne se fera pas sans douleur. « De nombreux facteurs entrent en compte. Les cultures, la taille de l’exploitati­on, sa santé économique, le nombre de salariés…, explique-t-on. Toujours dans notre réseau, on se rend compte que les arboricult­eurs ont de plus grandes difficulté­s à faire sans l’herbicide. Parce qu’ils perdent en efficacité ou que la surcharge de travail devient trop importante. » Les pro-glyphosate nient aussi l’intérêt du labourage, parfois utilisé pour désherber. « Le labourage n’est pas sans conséquenc­es pour l’environnem­ent, indique Jean-Claude Bernard. Non seulement l’agriculteu­r doit passer à plusieurs reprises sur ses parcelles en tracteur, ce qui augmente les émissions de gaz à effet de serre, mais en retournant la terre, vous accélérez aussi l’érosion des sols. »

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A Bailleul (Nord), le 15 juin 2015.
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La Commission européenne souhaite que l’autorisati­on soit prolongée de dix ans.

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