Les Russes sont piqués au vif
Le pays hôte de la Coupe du monde a dû faire face à un vaste scandale qui pèse encore sur l’équipe nationale de football
Hajo Seppelt n’est pas franchement le bienvenu en Russie. Le journaliste allemand d’ARD s’était même vu refuser, dans un premier temps, son visa pour couvrir la Coupe du monde 2018. En cause : un documentaire consacré au dopage dans le football russe où Grigory Rodchenkov, ex-directeur du laboratoire antidopage de Moscou, affirmait au sujet d’échantillons de footballeurs suspects, sortis entre 2012 et 2015 : « Je recevais mes ordres de Mutko. Il m’a dit : “On ne touche pas au foot.” J’ai suivi ses ordres et j’ai oublié ces tests. »
Vitali Mutko, ex-ministre des Sports, président de la Fédération russe de foot et directeur du comité d’organisation du Mondial 2018, a été mis de côté par le Kremlin. Il était temps : il était accusé d’avoir organisé le système de dopage qui a permis à la Russie d’ob- tenir des résultats aux JO de Sotchi en 2014, en s’aidant de combines dignes des romans de John Le Carré. Suffisant pour se demander si les footballeurs de la Sbornaya commenceront le Mondial chargés comme des mules. « C’est la question que tout le monde me pose, mais je ne peux pas y répondre, concède Hajo Seppelt. J’ai du mal à imaginer que la Russie prenne un tel risque après tout ce qui s’est passé. » Mais les joueurs ont-ils été dopés à un moment de leur carrière ? Ça, c’est autre chose. Parmi 34 échantillons suspects évoqués dans le rapport McLaren sur les techniques de dopage russe lors des JO 2014, Rodchenkov dit avoir reconnu « un joueur » de l’équipe actuelle… Dmitry Simonov, spécialiste de l’équipe nationale à Sport-Express, le principal quotidien sportif du pays, ne croit pas à la théorie du dopage organisé : « Les inspecteurs de l’AMA [Agence mondiale anti-dopage] ont presque harcelé l’équipe. Les joueurs savent bien qu’après tous les scandales des dernières années, ils seraient scrutés. Heureusement, il n’y a eu aucun résultat positif. » La Russie prend confiance. Eduard Bezuglov, le médecin de la sélection, n’a ainsi pas hésité à qualifier le championnat russe « comme le plus propre du monde ». Un sentiment renforcé après le rapport de la Fifa à l’AMA, dans lequel l’instance assure n’avoir trouvé « aucun élément permettant d’établir une violation des règles antidopage par les joueurs russes participant au Mondial 2018 ». Hajo Seppelt, lui, préfère rester prudent : « Si les résultats sont négatifs, peut-être qu’ils le sont vraiment et qu’il faut faire avec. »
« Les inspecteurs de l’AMA ont presque harcelé l’équipe. » Le journaliste russe Dmitry Simonov